Mon couple: jour 4

Mon couple: jour 4

Un jour l’aidé peut devenir l’aidant. Un travail sur soi-même est nécessaire pour développer sa patience et son calme. Accepter la différence de l’autre, tout comme elle a fait auparavant. Réapprendre la personne que nous aimons, tout en ne se laissant pas envahir par le passé. ce passé parfois lourd pour l’un, effacé pour l’autre. Mais dans tout les cas, l’un peut être devenu aidant, mais l’autre y est toujours à sa manière.

Mon couple: jour 1 (une femme ayant fait une rupture d’anévrisme et un homme handicapé moteur)

Mon couple: jour 1 (une femme ayant fait une rupture d’anévrisme et un homme handicapé moteur)

Ma compagne a fait une rupture d’anévrisme, il y a deux ans. Cela s’est passé une nuit. Elle s’est levée avec un fort mal de crâne, vomissements, puis évanouissement. J’ai appelé mon père, et les pompiers l’ont transporté en hélicoptère à Lille. Après 3 heures d’opération, ma compagne a passé 2 mois dans le coma.

Tous les week-ends, avec l’aide de ma famille, j’allais la voir en soins intensif. Au début, ce fut très difficile de la voir entourer de tant de machines, et totalement inerte. Puis je me suis habitué, et je me suis mis à lui parler normalement, voir même à lui dire des bêtises.

À son réveil, j’ai rapidement compris que ma compagne avait d’importants de mémoire et qu’elle était retombée en enfance. Ensuite elle est restée une année en centre de rééducation.

À présent, nous vivons ensemble avec des Intervenant.e.s à domicile. De plus, nous sommes complémentaires dans nos handicaps : ma compagne est mes bras, je suis sa tête.

J’ai écrit des articles sur notre couple: lien
De plus, j’ai imaginé un dialogue avec l’ancienne personnalité de compagne: lien
 

Avantages de notre handicap pour l’autre

Pour ma compagne: me mettre en manuel et se sauver, ne pas me nourrir si je ne l’obéis pas, et pas d’apèro si elle le veut  (c’est le pire).

Moi: pas de dispute (si problème, je sort de la pièce, et je reviens).

Dialogue du soir

Elle: il y a quoi à la télévision ce soir?

Moi: l’amour est dans le pré

2 minutes plus tard

Elle: il y a quoi à la télévision ce soir?

Moi: l’amour est dans le pré

2 minutes plus tard

Elle: il y a quoi à la télévision ce soir?

Moi: l’amour

Elle: OK, à condition que tu fais un strip-tease

C’est ça l’amour!

 

 

Humour et handicap

Humour et handicap

Ma compagne et moi aimons faire de l’humour sur notre handicap. Elle a fait une rupture d’anévrisme et j’ai une paralysie cérébrale. Elle a des problèmes de mémoire, je ne marche pas, je fais des mouvements involontaires et je parle bizarrement.

Nous pensons que l’humour sert à alléger le poids du handicap, et de nous mettre tous au même niveau. Cependant l’humour doit être bien fait pour ne vexer personne.

Je vous propose une série de phrases que nous disons régulièrement pour se moquer gentiment de l’un et de l’autre:

Les dires de ma compagne

  • Lève toi et marche
  • Vous savez, c’est un faux handicapé, il est autonome en vrai
  • Il marche durant la nuit
  • Tout n’est pas handicapé chez lui
  • Ton handicap est lourd, quand même
  • Je lui dis: tu n’as pas de tête. Elle me répond: oui mais j’ai des jambes

Mes dires

  • Tu as déjà Alzheimer mon bébé
  • Mon petit poisson rouge
  • Tu es encore saoule (elle a des problèmes d’équilibre)

Situations propre à notre handicap

  • Lorsque nous allons chercher des frites à côté de chez nous, les personnes nous regarde bizarrement, car ma compagne ne se rappelle plus de la commande, malgré qu’elle semble valide, et moi, je lui rappelle la commande malgré mon handicap plus important physiquement.
  • Une fois, toujours dans la même friterie, après un bon apéritif entre amis, je me suis rendu compte que je pouvais changer les chaînes avec mon fauteuil électrique. Tout le monde se regardait vu qu’il ne comprenait pas se qui arrivait à la télévision.

L’humour sert à alléger la vie.

Tourner une page de vie

Tourner une page de vie

Dans quelques jours, cala fera trois ans que ma compagne a fait une rupture d’anévrisme. Depuis ce jour terrible notre vie a complètement changé: nous avons du oublié nos rêves, comme fonder une famille, et voir notre autonomie diminuer.

Trois années, ça peu par être long, mais j’ai l’impression que c’était hier. Je pense souvent à notre vie d’avant, et à la nuit du drame. Je n’arrive pas à tourner cette lourde page de ma vie. J’imagine que tout va redevenir à la normal, comme par magie.

Aider

Aider

Depuis ma naissance, des personnes m’ont toujours aidé physiquement pour me nourrir, aller aux toilettes, me laver, m’accompagner dans les sorties, et toutes les tâches quotidiennes. En résumé, je suis uniquement autonome sur un ordinateur. Le fait d’être aidé ne  me dérange pas, car j’ai toujours connu cela, c’est ma normalité. Le seul inconvénient à être aidé en permanence c’est que j’ai eu des difficultés à entrer dans le monde des adultes. Personnellement je me suis senti réellement adulte lorsque je me suis mis en ménage avec ma compagne. Elle m’a fait évoluer.

Cependant parfois je me sens diminué dans mon estime lorsque l’accès à une activité est soumis à l’accompagnement d’une personne, comme la piscine. Évidemment je comprends que les personnes handicapées doivent s’adapter à la société qui est en train de devenir inclusive. Nous sommes une minorité, et donc nous ne pouvons pas tout révolutionner, en quelques années seulement. Je souhaite remercier la totalité des personnes et des associations œuvrant pour cette transition. Je pense que cette transition va prendre beaucoup de temps, surtout pour faire changer les mentalités dans le domaine du handicap.

Depuis la rupture d’anévrisme de ma compagne, je suis devenu aidant, pas physiquement, mais au niveau de son organisation de vie. Cela demande un important travail sur soi-même et beaucoup de patience. Dans mon cas, je dois faire preuve d’une grande patience, car au vu de ces problèmes de mémoire, je lui répète plusieurs fois les choses. De plus, j’ai une double expérience : personne aidée et personne aidante.

Je suis arrivé à prendre ce virage de la vie grâce à l’éducation de ma famille. Elle m’a transmis l’amour d’aider son prochain.

 

 

Les départs

Les départs

Je vous propose un poème sur mon ressenti face aux différents départs de ma compagne après sa rupture d’ anévrisme.

 

Après une nuit terrible, je te vois partir sous les lumières bleues

Les derniers paroles de ton ancien toi firent « ne t’en fait pas, on se voit à l’hôpital »

C’était la dernière fois que je te voyait tel que je t’ai connu

Mais je ne le savais pas encore

Ce départ marqua un tournant définitif dans notre vie

Moins d’autonomie, moins de rêves et de projets

Puis je me demande à quel moment que tu as changé durant ton long sommeil

Et qu’est-ce que tu ressens dans ce noir?

***

Un an après, chaque jour, je te vois partir pour la maison d’accueil spécialisée

Tu es heureuse, mais ta faiblesse me fait toujours mal

Je t’ai connu si forte

Maintenant tu t’assoie à l’arrière de ton transport, tel un enfant

Je suis surpris de voir qu’une personne peut totalement changer à cause d’un accident de la vie

Si un être supérieur existe, pour quelle raison nous a-t-il fait cela?

Pour nous punir?

Nos projets de faire un bébé, des voyages et d’autres rêves se sont envolés

Faisant place à une autre vie

Une autre elle

Une autre elle

Je vous propose un poème sur mon ressenti face à la rupture d’anévrisme de ma femme.

 

Si différente, pourtant c’est la même femme

Une personne extravagante, avec des faiblesses

Mais son amour à mon égard, et sa forte personnalité sont toujours présents

Chose très perturbant, au vu de la mince frontière entre les mondes du handicap et du valide

Comment dois-je me comporter pour ne pas l’infantiliser?

Je veux la protéger, tout en continuant à la considérer comme une adulte

Cette situation est parfois difficile, car certaines personnes me considère comme un enfant

Puis sa rupture d’anévrisme a tué une femme, une future mère, et des rêves

Une vie modifiée, adaptée, mais pas brisée

Notre amour a recollé les morceaux

Et nous a rendu complémentaires dans notre handicap