La première fois

La première fois

Ceci est une histoire inventée avec des passages à caractère sexuel. Les opinions du personnage principal ne reflètent pas toujours les miennes.

Michael attendait nerveusement face à sa baie vitrée, la venue d’une personne qui allait lui faire passer une étape importante dans sa vie. L’homme était impatient, même si le grand jour devrait être la semaine prochaine, seulement. Le rendez-vous a été convenu grâce à une association Suisse spécialisée dans ce domaine particulier et interdit en France. Il y avait eu de nombreux échanges enrichissant pour Michael connaissant uniquement le sujet qu’au travers de sites internet inappropriés et ne montrant pas la réalité. Il avait envie de cet acte depuis quelques années. Mais il était en couple depuis des années, sans être en ménage. Cela posait un dilemme moral : faire une expérience significative dans une vie, ou rester fidèle à sa compagne. Évidemment il l’aimait, c’était son premier grand amour, mais comment devenir un véritable adulte sans ce passage, tant décrit et valoriser en excès par son entourage, ainsi que par la télévision ? Michael avait l’impression que ceci semblait plus lourd à porter dû au fait qu’il était un homme. La société renvoyait à tort, l’image hyper sexué des mâles, comme si un adulte sans rapport sexuel était une honte.

Avant de prendre sa décision, Michael avait réfléchi de longs mois. Mettre en péril son couple juste pour une pénétration, ça lui paressait futile, au fond de lui. Mais cette fameuse pénétration était, dans son imagination, un instant magique, unique, rempli de sensations, et pouvant donner la vie. De plus, depuis un certain temps, une dépendance à la pornographie apparue pour se détente, et afin de compenser le néant en thème de sexualité. Il n’aimait pas ce genre de films à cause de la violence faites aux femmes. Toutes façon, il visionnait principalement des vidéos où les femmes étaient dominantes. À plusieurs reprises, il essaya d’arrêter, mais cela lui provoquait des crises d’angoisse. Il aurait voulu consommer une autre drogue. Cependant son manque d’autonomie lui en empêcher. De plus, notre jeune homme était bipolaire. Cela avait pour signification qu’il ressentait, par moment, une forte excitation, durant laquelle il pouvait commencer des projets totalement fous, comme devenir le meilleur écrivain du monde. Puis venaient les moments de profonde dépression, où il ne pouvait plus rien faire, omis avoir des idées noires, et des envies de suicide. La cerise sur le gâteau était que notre homme avait une imagination fertile, surtout avec les personnes de son entourage. Il adorait s’inventer des vies en leur compagnie, comme étant l’amant de cette femme ayant des origines maghrébines, et deux enfants. Après avoir vécu une relation secrète, ils seraient mis en ménage dans une maison de maître, où il aurait été un bon beau-père. Mais Michael avait des histoires, dans sa tête, beaucoup plus sombres. Il avait un intervenant à domicile qui n’était jamais content, à quel point lorsqu’il commençait sa journée à 8h, il voulait déjà avoir fini. Cette individu osait se plainte tout le temps, devant une personne en situation de handicap. Dans son imaginaire, Michael torturait ces enfants face à lui, et le rendait handicapé pour qu’il est une bonne raison de se plaindre.

Encore une fois, la pornographie jouait un rôle important dans sa vie: elle lui permettait de régulier un peu son humeur ,et de moins ressentir ses émotions.

Puis un jour, Michael pris la décision de passer le cap avec une assistante sexuelle. Il savait que c’était immoral envers sa compagne. Évidemment le fait qu’elle ne puisse pas faire l’amour, n’était pas de sa faute. Mais Michael prenait soin d’elle depuis cinq ans. Donc, comme parfois dans un couple dit « valide », il décida de tromper sa copine, avec des remords. Cette réflexion consistant à dire que l’infidélité se justifiait par son aide, était complètement de bas niveau, mais l’homme possédait un côté individuel. Ce besoin d’avoir une bulle autour de lui, se protégeant du trop plein d’émotions. Et puis, nul était parfait.

***

Une femme passa dans la rue, regarda longuement la maison, puis fit demi-tour, pensant sûrement qu’elle ne se trouvait pas à la bonne adresse. Michael se dépêcha d’ouvrir la fenêtre grâce à la commande sur son fauteuil, afin de la rappeler. Elle avança prudemment vers l’entrée, avec une bombe lacrymogène dissimulée dans sa main, par peur de raconter une personne mal intentionnée. Une agression était si vite arrivée malheureusement.

Cette dame entra en souriant, et remettant discrètement son arme défensive dans sa poche. Elle était d’origine norvégienne, et cela se voyait au travers de ses yeux bleus très expressifs, sa peau laiteuse, et sa chevelure blonde coupée au carré. L’homme évalua son âge à une cinquantaine d’années.

Elle salua avec un grand sourire, et une sensualité un exagéré, avec le regard. La communication débuta par des présentation courtes vu que chacun souhaitait garder son anonymat.

À la grande surprise de Michael, rapidement la femme commença à lui caresser la cuisse, puis les mains. Sans un mot, un baissé léger fut donner, pour que l’homme ressent la sensation d’être désiré par une femme, même si c’était artificiel. Elle ne savait pas que Michael connaissait cette sensation au travers des relations intimes avec sa copine faites de caresses et de baissé. Durant ces moments-là, ses doigts lui montraient que sa compagne prenait du plaisir, mais pas lui.

L’assistante sexuelle lui demanda, tout à fait normalement, ceux qu’il voudrait faire durant l’acte, mais le jeune homme fut tellement surpris, qu’il ne sut répondre. Il avait vu tant de positions sexuelles sur internet, qu’il ne savait lesquelles choisir. Et à vraie dire, il n’avait pas réfléchi à la question. La dame lui proposa de lui répondre par message.

La rencontre se termina par la prise du rendez-vous pour le grand jour : le 14 juillet.

***

Durant la semaine qui l’amenait vers le grand moment, Michael se rendit dans un magasin proche de la demeure de son enfance, en compagnie de son intervenant à domicile. Il en profita pour faire un retour dans le passé, en allant dans un cul sac fini par un champs de maïs, où le jeune homme adorait rêvasser.

Le duo passa devant la maison. Elle avait bien changé : une sorte de vieux triage fermait la petite coure, des débris de toutes sortes songeaient le sol, et les murs étaient salis par le temps. Un sentiment de tristesse l’envahit. Son passé semblait résolu, et ce fait le conforta dans sa décision.

Sur le chemin de retour, Michael et son intervenante rencontrèrent une amie d’enfance qui habitait juste en face de lui. Il découvrit, avec une grande surprise, qu’elle avait déjà deux enfants, au même moment où le jeune homme allait seulement entrer dans le monde de la sexualité. Comme une impression d’être en retard : non seulement il n’avait jamais connu la fameuse pénétration, mais certaines personnes de son âge avaient déjà des enfants. Certes il était en couple, mais dépendant des autres, et sans avenir d’être un jour un couple dit « normal ». Cependant faudrait définir le thème « Normalité ». Avoir des enfants ? Faire l’amour ? Vivre ensemble ? Chaque couple possède sa manière de vivre, au final : avec ou sans enfant, ayant beaucoup ou peu de rapports sexuels, et parfois vivant séparément. Évidemment le principal c’est d’être heureux, mais difficile lorsque la société renvoie une image d’hyper performance dans tous les domaines.

***

Michael était allongé dans son lit, en caleçon, attendant l’arrivée de la dame. C’était quand même bizarre de faire un acte aussi intime avec une parfaite inconnue, pensa-t-il, tout en stressant un peu. En effet, peu de pression était sur ses épaules vu que seule son plaisir personnel allait compter. Pas besoin de se retenir le plus longtemps possible avant la jouissance, et d’après la rumeur populaire, ça allait vite la première fois.

Un bruit se fît entendre dans le salon, et une tête souriante passa par l’encadrement de la porte. La dame l’embrassa sur la bouche, en mettant le plus tendresse et de sensualité possible, encore une fois, pour que Michael puisse se sentir désiré. Elle lui clissa dans l’oreille qu’elle allait se changer pour être plus sexy. Quelques minutes après, elle revient habillée avec un ras-cou en dentelles noire, un bustier rouge fortement décolleté, et un string noir. Cette tenue devrait servir à chacune de ses prestations qui rendait accessible un monde à certaines personnes.

L’acte sexuel ne se déroula pas comme il avait imaginé. D’abord Michael fut un peu choqué lorsque l’assistante sexuelle mouilla son entre jambes avec sa salive. Cet acte lui fit penser à un film pornographie, et lui confirma de tout cela était faux : aucun désir envers lui, juste un rôle d’une heure, payant. Mais le moment fatidique allait arriver. La femme lui mis un préservatif, soi-disant pour ne pas salir les draps, puis lui monta dessus. Une explosion d’émotions devrait avoir lieu, accompagnée d’un bien être. Et, rien ne se passa, aucune sensation, malgré que la dame effectuait des mouvements de va et vient. Cette capote devait être la cause du problème, vu qu’il arrivait toujours à se donner du plaisir seul. II se concentra fortement, durant quelques minutes, sur la poitrine en mouvement, sortie du corsage, jusqu’à la jouissance, sans réel plaisir. Le jeune homme pensa, avec humour, qu’il avait dû battre le raccord de la plus longue durée pour une première fois.

Après un câlin, la femme partie, en lassant un goût féminin à Michael.

Le voilà homme, selon les critères de la société. Oui, il était fier d’être entré dans le moule, mais finalement, déçu par le peu de sensations ressentis. Le soir même, le jeune homme s’endormit en pensant à ce tournant dans sa vie, au son du feu d’artifice du 14 juillet.

Finalement rien ne changea dans sa vie, même pas une culpabilité envers sa compagne, peut-être à cause d’un amour secret envers une autre femme. Et qui sait, cette relation supposée deviendra, un jour, réelle, pour lui faire découvrir la vraie sexualité, et la vie d’un couple.

Épilogue

Vous devez sûrement prendre Michael pour un pervers sans cœur. Mais je pense que la pression de notre société oblige la majorité des personnes à entrer dans le moule, même si parfois, elles doivent faire des choses immorales. Puis nous avons tous des côtés opposés.

sexualite-et-handicap

Un voyage en gare

Un voyage en gare

Dorian était un grand rêveur plein d’imagination. La plus grande de ses passions, et la plus originale en même temps, était de se promener dans les gares, surtout celles de sa ville, c’est-à-dire « Lille ». Il trouvait en ce lieu toute la matière première servant à créer ses mondes : les gens. Il les observait en leur imaginant une vie en rapport avec leur physique, et avec les discussions qu’il entendait ou les leurs comportements. Cette activité lui servait uniquement à son bonheur personnel, il n’en tirait aucun bénéfice financier, comme nous pouvons y penser naturellement, par exemple en écrivant des histoires ou des romans. Il voyait au travers des personnes une source intarissable d’aspiration agissant sur lui telle une drogue, car, l’espace d’un instant, il oubliait la réalité.

 

Ce jour-là, Dorian décida d’aller à la gare « Lille Flandre » pour évidemment se donner à son petit plaisir. C’était une douce journée où le soleil faisait sortir doucement la nature de son sommeil hivernal. Les passants avaient commencé à enlever des épaisseurs de vêtements, et ainsi découvrir un peu plus leur peau.

Aussitôt pénétré dans la gare par un petit portail, Dorian vit une scène originale et touchante. Dans un petit local caché derrière une vitre fumée, un jeune couple se serrait dans les bras, tout en s’embrassant tendrement. L’originalité venait du fait que la femme était voilée, et l’homme, qui et contrôleur à la SNCF, ne semblait avoir aucune origine particulière. La demoiselle était très charmante. Son voile fessait ressortir ses fins traits dessinés sur sa peau brune.

Le garçon portait une légère barbe de quelques semaines, et son crâne était à nu.

 

Dans l’imagination de Dorian, ce jeune couple se cachait des regards, et surtout des préjugés. Ce n’était pas facile d’être un couple biculturel en ces temps-là. La famille du jeune homme penserait sûrement au terrorisme, et pour les plus extrêmes d’entre eux, ils s’imagineront Dorian partir pour rejoindre l’état islamique.

Du côté de la jeune femme, les parents seraient contre cette union pour cause religieuse. Ils voudraient que leur unique fille soit mariée avec un homme hautement croyant afin de respecter les coutumes familiales.

Pour le moment, le couple semblait être très loin de ces préoccupations. Ils s’aimaient tout simplement, et l’avenir leur préoccupait peu.

 

Un peu plus loin, Dorian rencontra un jeune garçon, d’environ douze ans, en train de demander de l’argent aux passants pour pouvoir acheter une barre chocolatée au distributeur. Il disait à voix très haute : « j’ai mal au ventre tellement j’ai faim », tout en tenant le ventre à deux mains. Parfois, il arrêtait une personne pour lui expliquer qu’il attendait un ami pour prendre le train, et qu’il n’avait rien mangé de la journée. Les gens souriaient, car le garçon n’avait pas de talent pour la comédie. Il surjouait grossièrement, comme presque la totalité des enfants de son âge.

Dorian l’imaginait vivant dans un camp sauvage non loin de là. Il mendiait, de façon dissimulée, pour pouvoir se nourrir évidemment, mais également sa famille.

Tous ces gens avaient dû fuir leur pays d’origine pour essayer de trouver une vie meilleure, loin de la massière. Mais malheureusement, pour nombreux d’entre eux, en arrivant en France, un enfer les entendait.

Dorian eu envie de faire un petit cours de comédie à l’enfant afin qui soit plus crédible. Mais le contact humain et Dorian, ça faisait deux. Il n’était pas doué avec les personnes, et il ne faisait rien pour arranger ça. Son truc, c’était les rêves, voilà tout.

Notre héros se dit : « certes, ce garçon ne sera sûrement pas très cultivé vu qu’il ne va pas à l’école. Mais, avec l’expérience acquise, il sera obligatoirement débrouillard. Et qui sait, avec les années passantes, il deviendra peut-être un bon comédien. »

 

Il prolongea son chemin, et croisa un jeune couple se donnant leurs derniers baissés avant un au revoir déchirant. Des larmes coulaient sur les joues féminines. L’un entre eux devait obligatoirement habiter loin : une jolie rencontre par internet.

Et si ces larmes étaient fausses. Peut-être cette jeune femme, une fois seule, allait dans les bras d’une autre personne. Si cette supposition était vraie, elle devait ressentir un malin plaisir en pensant à l’autre con en train de l’aimer comme fou. Elle avait besoin de cette domination pour se sentir heureuse. Puis, au fond elle, elle aimait les deux.

 

Dorian se fit bousculer par un homme en costume qui ne s’excusa pas. Cet individu devait prendre une correspondance pour se rendre à un rendez-vous professionnel. Il ne faisait aucune attention au monde qui l’entourait. Il était totalement enfermé dans une bulle où seul la performance comptée : être le meilleur pour gagner le plus d’argent possible. La famille passait au second plan.

En une fraction de seconde, tout s’envola. Ce n’était juste qu’un rêve.

Un amour un peu trop mâture

Un amour un peu trop mâture

Je me présente rapidement : Michaël Salon, 27 ans, en recherche d’un emploi depuis six mois, habitant d’une petite ville du nord de la France, et amoureux depuis peu de temps. Je vais vous raconter ce dernier point en détail. Mais auparavant, je vais vous narrer le contexte.

 

Je vie toujours chez mes parents dans une fermette datant du dix huitièmes siècles. Mon père et ma mère élèvent des vaches qui se promènent à leur aise dans une pâture non loin de la maison, et bordant une forêt. En été, durant les chaudes journées, je m’allonge à l’ombre des arbres, et rêvasse au son du ruisseau situé à quelques mètres de moi. Mes pensées tournent autour de différentes d’îles paradisiaques vues à la télévision. Ceci ne peu d’être qu’au travers de films ou de documentaires télévisés, car je ne lis pas, à mon grand regret. Vous, lecteur, allez me dire qu’il n’est jamais trop tard pour ouvrir des livres, ou même des bandes dessinées. De surcroît, mon jeune âge me permettrait de découvrir facilement de nombreux univers, tous propice à l’évasion, et riche en émotions. Mais voilà, je l’avoue avec honte : je suis très fainéant. Durant toute ma scolarité, d’après mes enseignants, j’étais un élève ayant beaucoup de capacités intellectuelles, mais ne voulant pas les utiliser par peur de se fatiguer. C’est vrai ! Même après le bac, où normalement on trouve sa voix professionnelle, et donc on se met à étudier par passion, moi, je passais mon temps dans les fêtes d’étudiants, durant lesquelles j’ai découvert le plaisir charnel. Non pas la drague, mais bien le sexe, car, au sein de ces les lieux, les jeunes femmes, qui sont encore des filles selon moi, sont souvent sous l’emprise de l’alcool, et par conséquent, veulent faire de nouvelles expériences avec des post adolescents en rut. J’ai vite compris que les mots ne servaient à rien avec ces supposées dames (souvent elles jouaient les « femmes », mais de façon grossière, sans aucune élégance, telle une fillette jouant à l’adulte, en plus vulgaire évidemment). Seul un bon déhanché sur la piste de danse comptait, ajouter à cela, un paraître irréprochable (de préférence, totalement superficiel, et copier bêtement sur un chanteur ou un sportif). Après quelques musiques, en fin de soirée, passées à se frotter l’un sur l’autre dans l’ivresse de l’alcool, mélangeant ainsi les sueurs, la fille ou le garçon invitait l’autre à venir chez lui.

J’ai ramené une vingtaine de filles dans mon lit. Par la suite, j’ai vite compris que le sexe n’était pas ça : une femme essayant de faire un streep tease et tenant à peine debout, des préliminaires se résumant à une fellation ou un cunnilingus rapidement avorté pour cause de nausée, et un accouplement mené par le moins saoul. Le but de ce pitoyable spectacle était d’en finir le plus rapidement possible pour pouvoir dormir, et donc dessaouler.

Heureusement, quelques années plus tard, j’ai connu le vrai plaisir sexuel.

 

En ce moment, je suis au chômage comme vous savez, donc j’aide mes parents avec les animaux (certes, je suis fainéant, mais mes parents sont mon modèle). Je lave l’étable, je sors et je rendre les vaches, et je nourris les quelques poules. Par chance, je n’ai pas besoin de beaucoup d’heures de sommeil, sinon je ne pourrais pas effectuer ces tâches. En effet, trois fois par semaine, j’ai gardé l’habitude de sortir en boîte de nuit. Et cela malgré le fait que je sois en couple depuis un mois. Vous allez me juger, sûrement en disant que je suis une mauvaise personne, je n’aime pas ma nouvelle copine, et peut être d’autres choses encore plus difficiles à entendre. Pour faire court : j’aime Ségolène, ma puce, comme je l’appelle, mais les boîtes de nuit me font sentir « homme ». Les femmes s’intéressent à moi, me draguent, puis m’invitent chez elles pour prendre du bon temps. De plus, le fait que maintenant je refuse de les accompagner, un plaisir un peu malsain grandi en moi : à chaque fois, je me sens dominant. De plus, je suis tel un funambule. J’ai l’impression que je peux tomber du mauvais côté à tout moment, c’est-à-dire casser mon jeune couple pour une nuit entre les cuisses d’une inconnue, probablement étudiante et sans aucune expérience sexuelle. Ce dernier point me gênerait énormément, car ma copine actuelle possède une grande expérience dans ce domaine grâce à son âge. Même si on ne dit pas l’âge d’une dame (je suis contre la politesse d’un autre siècle. Et puis, les femmes sont l’égal des hommes), Ségolène a 42 ans.

 

Comme vous avez pu comprendre, Ségolène est une femme mâture. Elle possède une longue silhouette très mince (même trop mince). Aucune forme féminine ne déforme ses vêtements. J’ai longtemps pensé qu’elle était anorexique, car, une fois nue, on peut voir ses côtes, ainsi d’autres os, au travers de sa peau. Évidemment cela n’est pas de tout sexy (c’est même un peu repoussant). Cependant son visage sublime ce corps. Ses yeux bleus attirent tout de suite le regard. Ils ressortent du visage grâce à leur couleur, et surtout à l’intensité des messages transmis. Ségolène peut faire comprendre tout une série d’émotions par un seul regard. Le regard que je préfère est celui du désir (vous allez sûrement dire : « normale, tu es un homme ». Je vous répondrai : « j’aime simplement ma copine »). Elle me regarde avec insistance, comme si je suis sa proie. Je sens monter mon envie, je deviens son élève entre ses mains expertes.

Sur ce visage, le temps a plissé sa peau sous ses yeux. Ces traits me rappellent son âge, car le restant de son visage semble être resté dans une autre époque, plus précisément quand elle avait trente ans. Aucune ride ne déforme sa peau légèrement trop blanche.

D’une manière générale, Ségolène est très féminine. Elle porte souvent des robes, voir des jupes, avec des bottes. Associé à cela, un léger maillage qui assombrit légèrement sa peau. De plus, une chevelure noir corbeau lui tombe légèrement, sans aucune ondulation, jusqu’au milieu de son dos.

Cependant, cette féminité est atténuée par son côté « motarde ». Elle adore faire de la moto. Personnellement je la trouve très sexy lorsqu’elle enfile sa combinaison rouge moulante, et qu’elle enfourche sa bécane de course. Je l’avoue, c’est un truc d’homme. Mais avouez que voir une femme dans une combinaison très proche du corps, surtout au niveau des fesses, ça fait fonctionner l’imagination. On se voit très bien à la place de la machine. Ce qui est sûr, c’est qu’avec nous, la femme n’aurait pas froid aux fesses.

Ségolène fait de la moto pour avoir des sensations fortes. D’après ces dires, elle se sent vivante sur sa machine. Personnellement, je n’ai jamais compris ces gens qui doivent jouer avec la mort pour se sentir bien. La contemplation de la nature me suffit amplement.

 

J’ai connu Ségolène lorsque j’avais vingt ans. Ces parents sont venus habiter jusqu’à côté de la ferme. À cette époque, je n’ai pas fait pas attention à elle, sûrement à cause de notre différence d’âge. Cependant, si ma mémoire est bonne, j’ai dû prendre mon pied avec l’une de mes conquêtes en passant à elle, car sa beauté m’avait attiré.

Elle habitait à Lyon où elle exerçait le métier de secrétaire médical. Elle venait voir régulièrement ses parents pour leur montrer son fils qui a eu sur un coup de tête avec un homme rencontré dans un bar. Je dis sur un coup de tête, car, après seulement six mois de vie commune, elle tomba enceinte accidentellement (j’ai du mal à la croire vu tous les moyens de contradiction existants). Je crois plutôt qu’elle voulait devenir mère immédiatement, tel un caprice d’enfant.

 

C’est seulement récemment que je me suis intéressé à elle. Peut-être que les années passantes, sans me rendre de compte, j’ai mûri, et je me suis mis à apprécier les femmes plus mâtures. Je la croisais régulièrement, car, après m’avoir renseigné auprès de mes parents, qui connaissaient un peu les siens, elle venait de se séparer de son compagnon, et donc elle était revenue chez ses parents avec son fils, en attendant de trouver un logement.

Rapidement, je m’étais aperçu qu’elle me souriait chaque fois que je la regardais. Peu à peu, une drôle de sensation naquit en moi. Ce n’était pas un désir sexuel, comme j’en avais l’habitude avec les autres filles (bizarrement, je n’arrive pas à employer le mot « femme »), mais une envie de la connaître, de passer du temps avec elle.

 

J’ai fait le premier pas, avec une grande timidité et une plus grande maladresse, en l’invitant en boîte de nuit. Au début, je pensais que c’était une mauvaise idée vu son âge, et que c’était sûrement trop rapide. Une femme de son âge devait préférer les dîners romantiques dans un bon petit restaurant pour apprendre mieux à se connaître. Malheureusement je n’avais pas d’argent à cette époque (et encore maintenant). Cependant je me trompais totalement. Elle fut très ravie de cette invitation. Cela me mit immédiatement la puce à l’oreille.

Le soir venu, tout sourire, je me suis préparé en m’habillant d’une chemise blanche, d’un jeans délavé au niveau des cuisses, et d’une paire de « coverse all star » en cuir bleu foncé. Ma barbe fut raccourcie avec ma conteuse électrique pour cheveux. J’en profitais pour faire de même avec les quelques poils qui me restaient sur le caillou. Eh oui ! À mon âge, j’ai déjà une calvitie avancée : le dessus de mon crâne est totalement lisse. Il faudrait que je me fasse la coiffure de « monsieur propre » afin de ne plus ressembler à un moine, mais cela appliquerait que je devrais prendre du temps pour me raser régulièrement. Fainéant comme je suis, au bout de deux semaines seulement, j’arrêterai.

 

Je suis parti chercher Ségolène chez ses parents. Elle avait une jupe noire, un peu trop courte à mon goût, fait dans un tissu légèrement transparent, des bottes en cuir noir qui s’arrêtaient à quelques centimètres des genoux, et un simple débardeur blanc.

Son maquillage était plus marqué qu’à l’habitude : un fard à paupières noir lui donner un air de jeune gothique en recherche d’identité (sûrement elle voulait se rajeunir, mais c’était de façon maladroite). Un fond teint fonçait sa peau beaucoup trop blanche aux naturelles. Et pour finir, un rouge à lèvre rouge « pute » (je suis désolé, je n’ai pas trouvé d’autre mot) grossissait artificiellement ses lèvres.

Je ne vais pas vous mentir, j’avais l’impression d’être face à une femme facile, mais cela ne me dérangeait pas. Je me sentais homme.

 

Dans la boîte de nuit, nous avons fait connaissance difficilement à cause du bruit ambiant. Elle me racontait un peu sa vie passée, et surtout son ex-mari qu’elle me fit un tableau épouvantable : un homme sans humour, et qui voulait tout diriger comme un dictateur. Cela me faisait rire, car la majorité des femmes que j’avais rencontrées critiquaient toujours leur « ex » en dressant un horrible portrait. Je me suis toujours demandé pourquoi elles avaient choisi cet homme. Comme si elles se rendaient compte au bout de quelques mois, voire parfois de plusieurs années, que leur copain, ou mari, était en fait des vraies saloperies. Évidemment, je sais très bien qu’on ne connaît jamais totalement une personne, mais je pense qu’on peut cerner une personnalité rapidement.

 

Durant nos discussions, je regardais les autres femmes. C’était des jeunes qui se trémoussaient contre des puceaux assoiffés de sexe. Oui, j’ai été à leur place, il y a quelques années, mais ça me fait plaisir de voir mon évolution. J’étais assis à côté d’une femme mâture qui me désirait. J’espérais être à la hauteur, si je l’emmenais dans un lit, car c’était une femme d’expérience. Normalement, il n’aurait pas de problème vu toutes les petites minettes que j’ai eues dans mon lit. J’ai dû avoir tous les formats. Des maigres avec des corps d’enfant, des grosses ayant des seins énormes qui m’amusaient beaucoup, des grandes qui ressemblaient à des mannequins, des petites pouvant presque me suçaient debout, des belles qui me donnaient à réfléchir avec ma conscience, et des moches qui me demandaient une grande concentration pour arriver à mes fins. Vous devez sûrement me prendre pour un monstre assoiffé de sexe. Je ne suis pas un monstre, j’aime simplement le sexe, comme certains aiment fumer ou boire. De plus, je respecte les femmes. À aucun moment, je ne les ai jamais obligés à coucher avec moi, c’était leur volonté. Et puis, je me représente les femmes comme le berceau du monde : chaque individu vient de leur vendre. Donc j’ai énormément de respect pour eux. Enfin, pour finir, comme tout le monde, j’ai une mère, donc, si je pensais manquer de respect aux femmes en général, j’aurais arrêté depuis longtemps mes sauteries, car j’aime ma mère.

Tout cela pour dire : j’espérais répondre aux attendre de Ségolène. Mais je me posais une question bête (l’alcool rend con) : comment est le sexe d’une femme mâture ? Est-il poilu ? Les lèvres sont-elles tombantes ? A-t-il une odeur particulière ? J’aurais dû me ressaigner sur internet, pas au travers de « Youporn », car j’ai toujours testé la pornographie (là, en occurrence, c’est vraiment un manque de respect envers les femmes en général), mais pour lire des commentaires sur des forums. Puis non, j’ai pensé que c’était mieux de le découvrir par sois même, en espérant de ne pas avoir de mauvaise surprise.

 

En fin de soirée, nous partirent chez moi. Nous entrâmes sans bruit dans la maison endormie, et nous dirigeons, tout en nous fessant nos premiers baissés (dans la voiture, nous échangeâmes des regards coquins et des caresses, mais pas de baissés), vers la chambre.

Arrivés dans le lieu voulu, nous nous déshabillons rapidement, car notre envie l’un envers l’autre était puissante. Je voulais la voir nue rapidement : découvrir ses courbes, son touché, son odeur et sa saveur. C’était bon ! Son corps était nu devant moi. Je n’avais plus peur. Un état second m’enveloppait, me faisant sentir comme un homme expert en sexualité. Je me mis à la toucher son visage comme si je voulais découvrir chaque trait. Je fis pareille le reste de son corps. Ses seins manquaient de volume, mais ils étaient très bien dessinés, et avaient un bon goût. Ses tétons se durcissaient sous mes coups de langue délicats. Son sexe était tout à fait normal, et il n’avait pas d’odeur particulière (me voilà soulagé).

Je me suis senti un peu déçu au moment de toucher ses fesses. Elles étaient décharnées. Par conséquent, ce n’était pas de tout agréable au touché.

Je me suis allongé, et Ségolène m’a monté dessus. Nous fîmes l’amour dans cette position durant quelques minutes seulement (l’alcool ou mon envie ne me permit pas de tenir plus longtemps). Nous sommes endormies rapidement dans les bras de l’autre.

Le lendemain matin, au réveil, mes parents firent une drôle de tête en me voyant descendre avec Ségolène.

 

Quelques mois plus tard

 

Les mois ont passé, et mon amour a grandi. Nous avons appris à nous connaître en discutant de notre passé, de nos goûts, et de nos envies. Puis il y a son garçon. Lui aussi j’ai dû apprendre à le connaître, tout en trouvant ma place vis-à-vis de lui. Sa mère m’a bien fait comprendre que je n’étais pas son père (ce qui est tout à fait vrai), mais cette manière de penser ne m’aidait pas à trouver ma place. Je suis quand même adulte, donc j’ai le droit d’engueuler le gamin. Je ne suis pas en train de dire que cela me plaît (j’ai horreur de ça, car selon moi, on peut élever un enfant en lui expliquant calmement les choses), mais je suis également chez moi (nous avons trouvé rapidement une location dans un petit village), donc j’ai le droit de vivre selon mes principes. En plus de cela, je dois composer avec le père du gamin qui est un peu plus ouvert d’esprit de son ex-femme. Contrairement à elle, j’ai ma place dans ma famille, et un rôle à jouer dans l’éducation de son enfant. Mais à chaque retour de son enfant, il le questionne pour savoir si tout c’est passé (le gosse me l’a dit). Je comprends qui le fait, mais je ressens une pression supplémentaire, comme si je n’avais pas le droit à l’erreur. Même si je me sens plus mûr depuis plusieurs mois, j’ai quand même encore le droit à l’erreur. Je n’ai jamais été père, et j’ai toujours un manque de maturité. Puis en un instant, me voilà beau-père, obtenant ainsi toutes les responsabilités qui vont avec.

Au sujet de Christophe, le garçon, je me sens proche de lui. On s’amuse au foot, je le taquine, on rigole ensemble comme des enfants. Je suis un peu son confident, tel un ami.

 

Concernant Ségolène, je continue à la découvrir, tout en continuant à apprendre à vivre en couple, chose pas facile lorsqu’on a vécu tant années chez ses parents. J’ai dû me faire à ses habitudes. Le plus compliqué était la nuit. Je devais faire attention de ne pas trop bouger pour ne pas la réveiller. J’avais pris l’habitude de m’étendre tout mon long en prenant un maximum de place. Évidemment cette position n’est pas conseillée lorsqu’on dort à deux, les coups peuvent vite pleuvoir. Je me suis habitué à dormir sur mon vende avec les bras le long de mon corps, et Ségolène mettait son bras et sa jambe sur moi. Je sentais ses poils pubiens sur ma peau qui me fessaient frissonner de temps en temps.

Puis, j’ai dû me faire à ses sauts d’humeur. Par exemple, on était en train de regarder un film sur notre ordinateur portable, lorsqu’elle a commencé à me parler de mes ex-copines, ou plutôt m’interroger au sujet d’eux, et plus précisément sur leur nombre, leur prénom, leur âge et leur physique. Chose compréhensible, car toutes personnes en couple aiment connaître le passé de l’autre. Mais je n’arrivais pas à comprendre pourquoi elle voulait en parler maintenant. On était tranquille. Puis son ton a commencé à changer devenant plus agressive. Elle voulait tout savoir, et à chaque fois, elle apportait un jugement comme si elle voulait me faire culpabiliser d’avoir eu tant de femmes. Je lui répondais que je ne pouvais pas revenir en arrière pour changer les choses, mais elle voulait toujours plus de détails. Le ton montait de plus en plus jusqu’à une dispute éclate. Puis, aussi vite que la dispute a commencée, Ségolène se calma, nous continuâmes à regarder le film comme si rien ne c’était passé.

Il y a également d’autres défauts qui me surprennent, comme le fait qu’elle s’intéresse à un soi-disant ami au moment qu’il va mourir. Elle n’avait plus aucun contact avec lui depuis dix ans. Et là, à l’annonce de sa mort imminente, elle n’arrêtait pas d’en parler comme si c’était son meilleur ami, et qu’elle le voyait chaque semaine. J’avais envie lui dire : « tu ne l’as pas vu depuis des années, et tu ne l’as même pas été le voir une seule fois lorsqu’il était malade, donc arrête de faire des manières ». Je ne lui ai rien dit, car, à l’époque, on était un jeune couple, et je ne connaissais pas encore ses réactions.

Attention, au travers de l’énumération de ses défauts, je ne suis pas en train de dire que je sois parfait. Évidemment, comme tout le monde, j’ai au minimum un défaut. Voici le mien : j’aime un peu trop la boisson. Pour me sentir bien dans ma peau, je dois boire une demi-bouteille de « whisky » par jour. Grâce à cela, je plane, et mon humeur reste constante. Si je n’ai pas ma dose d’alcool journalière, mon moral fait les « montagnes russes » : parfois je me sens totalement dépressif, j’ai envie de ne rien faire, d’autre fois je me sens tellement énervé que je pourrais retourner la maison. Souvent un état dure un mois. Puis pendant une semaine, j’ai l’impression de vivre normalement. Finalement, l’autre état commence. On peut représenter cela comme un cycle. Durant les hauts et les bas, j’ai quelques moments de calme le soir. Durant ces périodes, J’ai l’impression que je pourrais faire une activité artistique, car je voyage dans un état d’esprit qui me donne envie de créer. Malheureusement je n’ai aucun talent. J’ai déjà essayé d’écrire des histoires et de dessiner, mais j’avais l’impression de faire de la merde sans nom.

J’aurais dû consulter un spécialiste pour trouver mon problème et le résoudre, mais ma méthode fonctionne bien, et Ségolène ne dit rien.

 

Notre différence d’âge choquait les gens, surtout nos parents. Ils ne comprenaient pas notre amour. Il faut dire qu’à leur époque, les couples avaient deux ou trois ans d’écart au maximum. Le fait le plus choquant, pour eux, était que Ségolène aurait pu être ma mère (maintenant que j’y pense, cela peut être considéré comme un peu un retour aux sources. D’après les préjugés, c’est très rependu dans notre région). On était quand même invité chez eux pour les repas de famille, mais un malaise régnait toujours dans la pièce : les discussions étaient fort rares, et plutôt courtes.

Nous ne faisons pas attention à cela. Nous nous aimons, le reste avait peu d’importance. C’est con à dire, mais c’était parfaitement notre manière de penser.

 

Quelques années plus tard

 

Me voilà père. Ce n’était pas prévu, en tout cas de ma part. C’est petit d’homme d’un an qui s’appelle Théo. Je suis très heureux d’avoir pris cette responsabilité. Puis je l’aime ce petit bout. Je le protège, je le fais rire (parfois ses fous rires me font pleurer), je le nourris, et je le lave. J’ai envie de le faire grandir dans un environnement le plus stable possible avec l’aide de mes parents qui sont ravis. Mais il y a un problème : je ne suis plus en couple avec Ségolène. Mes travers ont repris possession de moi. Après que le voile de l’amour s’est levé, et que l’ennui s’est installé, je suis retourné en boîte de nuit en cachette (après les quelques sorties officielles durant les premiers mois, j’avais totalement arrêté ces conneries), en disant que j’allais chez un ami. Ségolène ne m’empêchait pas de partir, sûrement elle pensait qu’elle ne devait pas trop m’étouffer vu ma jeunesse. Cependant elle s’est vite lassée de me voir dessoûler dans le canapé entouré d’un nuage de tabac froid mêlé, malheureusement, à des odeurs féminines. Ma faiblesse pour les jeunes femmes était trop forte. J’ai vu qu’en boîte de nuit, les filles s’intéressaient encore à moi, au travers de leurs regards. Au début, j’ai réussi à résister en pensant au bébé. Mais, lorsqu’on est saoul, la faculté de réflexion est fortement altérée. On ne pense plus vraiment. L’instinct animal reprend le dessous : les enfants et la femme officielle disparaissent de l’esprit. On pense qu’à assouvir nos envies sexuelles.

Quand Ségolène s’en est rendu compte, je l’avais déjà trompé trois fois (comme un con, j’ai donné mon numéro de téléphone, et la fille m’a envoyé un message. Évidemment Ségolène l’a lu). Naturellement, à la suite d’une énorme dispute, Ségolène m’a mis dehors sans délai. Je suis revenu chez mes parents avec honte. Comment expliquer à ses parents qu’on a trompé sa compagne (difficilement acceptée dans la famille) avec laquelle on vient d’avoir un enfant ? J’avais honte. Honte de mes faiblesses envers les femmes et l’alcool. Honte de ne pas avoir assumé mon rôle de père. Tout simplement, j’avais honte d’avoir déçu mes parents, mes modèles.

Lorsque je leur ai annoncé la nouvelle, ils m’ont puni de la plus forte des manières : le silence.

 

Comme dans la plupart des cas, nous avons décidé de faire une garde alternée avec des périodes d’une semaine. Vu le très jeune âge de notre fils, il ne se rendait pas compte de la situation. Il avait uniquement quelques difficultés à trouver le sommeil les premières nuits après son retour.

Je pense que les problèmes vont apparaître lorsque Théo va grandir, car, quand je vois la maturité de sa mère, je crains qu’elle retourne notre enfant contre moi pour se venger. Je trouve cela totalement con, transformer son propre enfant en arme (vous avez vu, je critique mon ex. Finalement, l’amour rend totalement aveugle). Il faut toujours penser au bien-être de l’enfant avant tout, et non aux conneries d’adulte en manque de maturité. Je suis loin d’être parfait, mais je placerai toujours le bonheur de mon fils au-dessus de tout. Maintenant que j’y pense, je peux m’appuyer sur cette volonté pour arrêter les conneries. L’amour d’une femme est échangeable, pas celui d’un enfant.

 

J’ai critiqué Ségolène, mais je l’aime encore. Elle m’a fait découvrir le vrai amour avec des sentiments sincères. Je n’avais jamais ressenti cela. Avant, c’était juste des aventures d’un soir sans aucun sentiment. Mais là, on était un vrai un couple avec des projets communs. Puis, elle m’a fait devenir père. Selon moi, elle m’a offert le plus beau cadeau possible, et cela, je ne pourrais jamais l’oublier. Mais il y a nos défauts respectifs. Normalement un couple doit être capable de surmonter les défauts de l’autre. Nous n’arrivons pas à faire cela. Ma dérive est trop importante. Aucune femme n’accepterait de se faire tromper, même si leur homme souffre de problèmes psychologiques. Peut-être un jour, je changerai, et donc je pourrais la reconquérir.

 

Trois ans plus tard

 

Je suis une autre plume. Mon identité n’a aucune importance. J’écris pour vous informer du suicide de Michaël. Je ne le connaissais pas très bien, mais selon les premiers dires, depuis six mois, il avait totalement arrêté l’alcool, et cela lui provoquait d’importants sauts d’humeur, et des crises de violence.

Il a laissé une magnifique lettre à destination de son fils, de ses parents, et de son ancienne compagne, Ségolène. Toujours d’après les rumeurs, la lettre se terminait comme ceci : « Ma mort nous protégera. »

Portrait d’une femme

Portrait d’une femme

Mon esprit vagabondait sur le monde, et plus précisément sur des femmes qui pourraient entrer dans ma vie sentimentale. L’image représentant le mieux la situation semblait être une vue de la terre par l’espace. Dans ce contexte, mon imagination fessait des agrandissements sur certains individus féminins. Je leur créai une vie avec ma présence. Aucune limite ne s’opposait à moi. Tous les continents n’étaient qu’immenses terrains de jeux m’offrant multiples sensations. L’amour, certes non réel, me transportait parmi une farandole d’émotions, toutes positives. L’agréable séjournait en moi. Je me sentais « homme », voir « mâle », ou plus précisément donjuan. Parfois, je l’avoue, en ressentant une légère honte, je courtisai plusieurs femmes à la fois, en ayant l’espoir d’avoir une double vie. La première en compagnie d’une fille plus jeune que moi afin de vivre à cent à l’heure. Elle me ferait revivre mes années folles, tout en effaçant ma maturité et mes responsabilités. Cette demoiselle posséderait des origines italiennes accompagnées d’une allure ainsi d’un caractère d’adolescente malgré ses vingt ans. La deuxième aventure serait en compagnie d’une dame qui aurait au minimum le double de l’âge de la première. Elle, au contraire, m’apporterait la maturité et la sagesse. Des courbes fortement prononcées sculpteraient son physique. Ce dernier donnerait envie à nombreux hommes de la serrer dans leurs bras. Cette « couguar » appartiendrait au pays nommé France.

Soudain, sans savoir pourquoi, ma pensée s’arrêta sur une femme.

 

***

 

Cette demoiselle courrait seule au centre d’une route qui traversait un quartier aisé américain. Les demeures reflétaient la richesse du lieu au travers de leur grandeur et de leur pelouse parfaitement entretenue situées en dessus des fenêtres. De chaque côté de la rue, on pouvait voir d’abord une rangée d’arbres à tronc grisâtre plantée sur une étroite bande d’herbe. Ces végétaux pleuraient l’été passé, couvrant ainsi le sol de grosses larmes orangées. Puis notre regard tombait sur un trottoir.

L’automne fessait planer un agréable parfum de feuilles en décomposition. L’humidité et la fraîcheur de l’air tonifiaient chaque personne qui mettait leur nez hors de chez eux. Ce fait se voulait être en contradiction avec la mort de la nature. Tous les végétaux crevaient en produisant une magnifique révérence colorée. Malgré la saison, le soleil illuminait en continu la ville, dans un silence presque absolu. Seuls les oiseaux n’ayant pas encore immigré créaient par leurs chants un agréable font sonore propice à la relaxation.

Halloween laissait encore des traces derrière lui par l’intermédiaire des décorations platées sur deux ou trois pelouses. L’atmosphère de cette fête venait juste de disparaître, sûrement grâce à l’astre journalier. En effet, cela faisait une semaine que la pluie n’avait cessé de tomber, entraînant avec elle la baisse du moral des habitants. Cependant, le soleil redessina un sourire sur la majorité des lèvres.

 

***

 

La jeune femme possédait un visage sculpté par un surplus de friandises. Sa forme ne se voulait pas être totalement ronde, comme les personnes en sur poids. Il possédait simplement quelques formes légères au niveau des joues. Elles lui donnaient un air chaleureux. Contrairement à ses yeux noirs légèrement allongés. En effet, ils plongeaient les personnes vues dans une certaine froideur. Son regard exprimait une dureté sûrement à cause de difficultés ou de drames rencontrés durant sa vie. La tristesse et le bonheur semblaient totalement absents, seule une grande force de caractère y régnait. Ces yeux se trouvaient être voisins de deux fins sourcils très bien épilés et d’un front un peu trop large. Le reste du visage se composait d’un petit nez légèrement écrasé et d’une bouche à lèvres très fines. Son sourire dessinait deux rides d’expression en forme d’arc de cercle sur ses joues. Elles lui donnaient un air chaleureux et enfantin, tout en fessant ressortir ses pommettes.

Une apparence gothique naissait d’un subtil maquillage sombre. Cela ne ressemblait pas aux peintures des adolescentes en mal de vie et fan de métal, musicalement parlant. Concernant Jennifer, la femme en question, cette parure coloriée ne possédait rien de grossier. Tout était dans la finesse et se concentrait autour des yeux. Un noire profond fessait ressortir les deux miroirs de son être, en durcissant encore plus son regard. Une peau blanchâtre mettait en valeur cet artifice.

Sa chevelure couleur corbeau lui descendait jusqu’à sa poitrine. Lorsqu’aucun élastique n’attachait ses cheveux (en occurrence, ce jour-là, ils se renfermaient dans une queue de cheval qui commençait en haut de son cou. Cette coiffure lui mettait en valeur chaque trait de son visage), une ligne blanche parfaitement droite se formait naturellement au centre du crâne. Sa toison descendait d’abord en ligne droite, pour ensuite onduler, et ainsi faisait naitre une chose brouillonne comme une rivière agitée.

Les hommes, qui la croissaient dans la rue, ne se retournaient pas automatiquement vers Jennifer. Cependant, lorsqu’une personne masculine prenait la peine de poser son regard sur son visage, elle pouvait se sentir transporter soit par ses yeux, soit par ses traits physiques.

Son corps ne répondait pas aux règles des magazines. Il était de petite taille, c’est à dire environs un mètre soixante, et très légèrement enrobé au niveau des hanches. Le reste semblait être sculpté par de nombreux exercices physiques. Un pull moulant noir mettait en valeur son ventre plat, ainsi d’une poitrine ferme. Elle donnait l’impression d’être plutôt au-dessus des normes.

 

***

 

Jennifer transpirait dans son survêtement couleur corbeau, malgré la fraîcheur ambiante. Elle aimait faire du sport, particulièrement de la danse classique. Deux fois par semaine, la jeune femme se rendait au sein d’un club qui se trouvait parmi le plus vieux bâtiment de la région. Le sol appartenant à la pièce se couvrait d’un parquet clair. La lumière naturelle se reflétait sur lui et dans les glaces disposées de chaque côté du lieu, révélant ainsi chaque petit détail, comme l’étrange ballet silencieux réalisé par les milliards de particules de poussière en suspension.

Toutes personnes entrantes en ce lieu étaient surprises par les immenses vitres qui leur fessaient face. Elles s’encadraient d’un vieux bois foncé. Ces carreaux lassaient voir un très beau paysage urbain. Il se composait de quartiers huppés séparés par des pairies et des bosquets aux couleurs automnales. Sans aucune explication spécifique, devant le paysage, on ressentait une impression de future. Peut-être, cette sensation venait des rayons du coucher de soleil qui fessait apparaitre une sorte de dôme parfaitement transparent. À l’intérieur d’une imagination fertile, ce dôme servait à protéger les habitants de la puissance solaire et de la pollution. Cette ressentît tranchait nettement avec la vieillesse du lieu. La guerre de Sécession résonnait encore dans les murs. À cette époque, le bâtiment avait servi de prison.

Devant les immenses miroirs se trouvaient des barres cylindriques servant aux danseuses à faire des échauffements.

Jennifer commença la danse à l’âge de dix. Elle suivit une amie. Les fillettes aimèrent tout de suite ce sport, malgré les douleurs musculaires engendrées par les étirements. Lorsque la musique se mettait en route, elles se plongeaient dans un autre monde. Leur esprit se vidait pour faire place à un bien-être, certes temporaire, mais tellement bon, surtout après une journée difficile à l’école (évidemment, le thème « difficile » était à mettre dans le contexte enfantin). Jennifer possédait une grâce naturelle. Ses mouvements se fessaient en toute légèreté, un peu comme ceux d’une plume dans l’air. Sa professeure n’avait jamais vu une fillette aussi douée, et pour temps cela faisait vingt années qu’elle enseignait. Des fois, la dame prenait la petite dans le cours supérieur pour la montrait en modèle (notre héroïne en était très fière). Plus tard, Jennifer commença les compétitions dont elle finissait toujours en haut du classement. Des récompenses en tout genre remplissaient sa chambre. Cependant, malgré son très haut niveau dans ce sport, sa mère et son père ne la poussèrent jamais hors de ses limites et privilégièrent toujours les études, comme tout bon parent. Aucune rivalité n’existait entre les meilleures amies (vu la différence de niveau, Mélanie, l’amie, aurait vite abandonné). Pour elles, c’était un simple jeu.

Par la suite, la scolarité demanda de plus en plus de temps. Par conséquent, les copines arrêtèrent temporairement la danse.

 

Jennifer possédait sa propre salle de danse chez elle (la femme continuait à se rendre au club uniquement pour garder un contact humain). La pièce s’étalait sur tout le premier étage de la demeure. L’ensemble des autres pièces se trouvait évidemment au second niveau. Le premier étage ne comportait aucune séparation. Une immense baie vitrée laissait entrer une forte lumière naturelle. Sur le mur de droite, formé par des glaces, la femme avait placé la traditionnelle barre d’étirement. Aucun meuble ne venait restreinte les mouvements de la danseuse dont ses pieds glissaient et sautaient sur un parquet imitation jeune bois appartenant aux tons clairs. Pour éclaircir encore plus l’endroit, les murs furent mis en blanc. Durant les jours ensoleillés, la femme pouvait s’exercer parmi un bain fait d’une lumière instance, sans aucune chaleur étouffante grâce à la climatisation. Durant les exercices physiques, son corps se couvrait d’une brassière grise et d’un pantalon « TREGGING » noir en matière synthétique très élastique. Elle pratiquait la danse chaque jour, espérant de se maintenir à son plus haut niveau et ainsi continuait à remporter des concours qui lui permettait de gagner de l’argent. Les sommes en jeu n’étaient jamais importantes, mais leurs accumulations créaient un salaire convenable.

 

***

 

Malgré la pratique de la danse classique, Jennifer possédait un côté « garçon manqué ». La jeune femme aimait de temps à autre boire une cannette de bière devant un match baseball. De plus, elle ne portait pas toujours des vêtements très féminins. Durant ses quelques rares journées de repos, elle s’habillait d’un gros survêtement gris qui lui donnait l’apparence d’un boxeur. Le fait d’avoir quelques caractéristiques masculines ne retirait rien à son charme. Ils ne la rendaient pas « femme homme » ou pour certains esprits étroits une homosexuelle jouant le rôle de l’homme dans un couple. Cette femme arrivait à faire naturellement ressortir ses traits féminins même quand la situation ne s’y prêtait pas. La danse classique lui donnait peut-être une grâce résistant à toutes épreuves.

 

***

 

Son caractère possédait aussi un côté masculin au travers de sa force. Elle ne montrait jamais ses sentiments. Une carapace empêchait les personnes de voir à l’intérieur d’elle. Cela ne lui donnait pas un aspect de froideur ou de distance. Elle aimait le contact humain et les relations amicales. Cela se voyait à son nombre d’amis. Jennifer pouvait compter sur eux dans les coups durs pour lui remonter le moral au tour d’un verre dans un pub irlandais. De plus, son côté « bonne vivante » lui donnait automatiquement le titre de leader du groupe. Les personnes l’invitaient à leurs fêtes afin d’être sures d’avoir une bonne ambiance. Pour ce faire, Jennifer ne buvait pas une importante quantité d’alcool (toute façon, la haute compétition de son sport l’interdisait toutes formes de drogues), comme la majorité des jeunes son âge. Son tempérament surfaisait amplement.

 

***

 

On pouvait se demander pourquoi mon imagination s’était arrêtée sur cette femme. Elle était loin d’être parfaite. Peut-être notamment que sa banalité m’attirait. Banalité ! Mais saupoudrée de quelques originalités, comme chacun entre-nous.

Cette attirance sera à jamais inexpliquée.

Une fenêtre sur ma vie

Une fenêtre sur ma vie

Cela fait cinq ans que j’étais né. Moi, un petit garçon brun aux joues bien rondes, se trouvait assis calmement sur une chaise faite d’un bois clair et d’une paille dorée qui picotait mes petites fesses. Mes pieds, habillés de simples socquettes blanches, se balançaient lentement au-dessus d’une grosse moquette marron appartenant à la chambre de mes grands-parents paternels. Ce revêtement donnait une sensation de confort, un peu comme si je me trouvai encore dans le ventre maternel. Les pieds des adultes s’enfonçaient légèrement à chaque pas effectué. Ils devaient sûrement ressentir la sensation de marcher sur un nuage.

Les murs me montraient un très joli paysage, réalisé en aquarelle, d’un lac encerclé d’une végétation luxuriante où volaient quelques papillons bleus. Le moi d’aujourd’hui se serait essaimant imaginé, voyant ceci, en train d’effectuer une promenade parmi un roman proustien. Et plus précisément, de faire la rencontre non réelle d’une jolie demoiselle à la peau forte blanche, habillée en bourgeoise. On aurait discuté non facilement pour cause d’une grande timidité de sa part.

Les meubles de la chambre se disposaient comme ceci : à ma gauche se trouvait un lit proposant deux places recouvert d’une couette décorée d’un coucher de soleil sur une mer parfaitement calme et un palmer planté au milieu d’une plage (aujourd’hui, cette représentation ferait clicher, mais à cette époque, l’image symbolisait les nouvelles séries télévisées américaines). Au-dessus de ce mobilier, une armoire formait un pont. Il permettait à mes grands-parents de ranger leurs vêtements (surtout ceux à mon grand-père, car les habilles appartenant à sa femme pendaient à l’intérieur d’une armoire localisée à droite du lit).

Sur ma droite, au fond d’un renforcement, une commode à sous-vêtements portait un miroir, une boîte à bijoux fortement décorée, et une lampe contenant un étrange liquide marron claire qui, selon mamie, pouvait tous nous tuer s’il y venait à se reprendre sur le sol. Sans savoir pourquoi, je ne la croyais pas.

Le mobilier était fait d’un bois foncé, ce qui absorbait une importante quantité de lumière, plongeant ainsi l’endroit au sein d’une pénombre et d’une fraîcheur semblable à celles des veilles demeures du sud de la France. Les meubles diffusaient leur senteur. Elle me certifiait l’ancienneté du lieu.

À côté de la porte d’entrée, donc derrière moi, un porte-vêtement sur pied proposait aux personnes entrantes des habiles de nuit féminins et masculins.

 

De mon jeune âge, tout me paraissait vieux. Vieux comme mes grands-parents, dont la femme, sévère pour ma réussite scolaire malgré mon jeune âge tout en ayant un amour débordant envers moi, et l’homme, bon vivant, mais avec un font râleur.

Ne voulant jamais rester loin de ma mère, je ne les connais pas encore très bien. Maman, assise à mes côtés, posait sa fine main sur ma cuisse, par peur que je tombe. En même temps, elle m’apprenait à boire avec une paille. Un verre d’eau rougie par du sirop de grenadine servait de terrain d’entraînement où le tube en plastique jaune canari bougeait en tous sens. Ma bouche mordillait l’extrémité au sec, au lieu de le pincer délicatement avec ses lèvres. De temps à autre, le liquide montait légèrement, puis retombait aussitôt en formant quelques bulles dans un bruit propice au rire.

« Yohan ! Inspire, ce n’est pas compliqué. Et comme cela tu pourras boire seule comme un grand » prononça une voix féminine enveloppée d’une fausse sévérité.

J’eus soudain envie de lui faire plaisir. Je pris la paille en pleine bouche et j’aspirai un grand coup. Le liquide sucré envahit instantanément ma bouche dans une joie partagée. La réussite d’un fils infirme engendre toujours du bonheur, pensa le moi actuel.

 

***

 

Mon père, ainsi que mon grand-père, travaillait sur le toit pour réparer la dizaine de tuiles cassées par la tempête survenue la nuit dernière. Les hommes pouvaient admirer un magnifique ciel bleu dépourvu de tout nuage, et s’étalant au-dessus d’un terrain de football, d’une allée d’arbres et d’habitations. Le soleil couchant fessait encore régner une agréable chaleur propre au mois d’août.

Je les regardais, tout en sachant que je ne pourrais jamais faire cela. Aucune tristesse ne me gagnait, car la conscience qu’une déférence m’accompagnée se trouvait déjà en moi. Mon handicap était ma normalité.

 

Par la suite, ma vie s’était assombrie. Mais ce jour-là, l’innocence me complaît de bonheur.

Des jeunes créés par la société

Des jeunes créés par la société

 

Julie Adams, jeune femme de vingt ans aux cheveux rouges formant des loques et attachées en gros chignon, se promenait dans la galerie d’un centre commercial situé proche de Maubeuge. Elle regardait, au travers d’yeux en amande verts devancés par lunettes à grosse monture noire, les différents produits exposés dans les vitrines. Ses vêtements colorés et trop larges tranchaient nette avec la blancheur de sa peau. Cette fille possédait une démarche non-chalande portée par des Converses rouges. Elle donnait l’air d’être rêveuse au travers de son regard un peu perdu, ou plutôt ailleurs. Il voyait le monde différemment. À propos de la différence, c’était le mot d’ordre de son exposé. En effet, Julie était étudiante en art et elle devait réaliser un travail sur la société de consommation. Pour ce faire, elle décida de filmer ce monstre, pour certaines personnes, à l’aide de lunettes possédant une petite caméra. Ensuite, l’étudiante réalisera un montage vidéo. Elle voulait absolument éviter de tomber dans les clichés habituels. L’étudiante allait essayer de trouver une approche innovante, peut être sous forme d’une normalité. Après tout, la consommation est nécessaire pour notre survie, pensa Julie. Évidemment, ce système possède des défauts : il crée des besoins superficiels et des inégalités. Cependant, il fait partie de notre vie.

 

Julie se voulait être une élève modèle. Sa passion pour l’art en général lui permettait d’obtenir de très bonnes et par conséquent prouver à ses parents qu’elle pouvait réussir une belle carrière dans le domaine artistique. Le problème venait surtout du côté du père. Comme là majorité des individus hors de ce milieu, il pensait que tous les artistes étaient des drogués sans argent. La jeune fille, à l’aide de sa mère, avait réussi à convaincre son géniteur de la laisser faire des études d’art en disant tout simplement que lorsque la passion est présente, on peut tout réussir.

 

À l’extérieur, le soleil d’été étouffait les passants comme dans un four. Les vitrines mettaient en valeur les différents produits servant à passer de bonnes journées sur une plage ou dans un camping. En effet, les vacances arrivaient très rapidement. Dans une semaine, les enfants finissaient l’école et les parents allaient les emmener voir d’autres paysages. La joie se voyait sur la majorité des visages. Les gens souriaient aux inconnus et les enfants rêvassaient à leurs futurs amis temporaires ou à leur première fête nocturne au bord de mer.

Julie, tant à elle, allait partir, en compagnie de trois amies, aux Pays-Bas dans un camping comportant que des petits baraquements. Ces dernières se regroupaient en îlots au tour d’une pelouse bien verte. Les jeunes filles avaient choisi cette destination non pas pour la drogue (fait habituel de la part des étudiants), mais pour l’ouverture d’esprit des habitants. Elles espéraient pouvoir entreprendre des conversations enrichissantes avec des autochtones. De plus, en secret, les quatre copines souhaitaient faire quelques expériences sexuelles. Elles n’étaient pas des filles facile ou vulgairement dit, des salopes. Tout simplement, elles aimaient le sexe à la même façon dont on aime la bonne nourriture. Ces drôles de dames choisissaient toujours des hommes mâture. Comme cela, elles n’étaient jamais déçues.

Ces jeunes femmes ne s’habillaient pas vulgairement, comme on pouvait le penser. Leurs vêtements appartenaient au style baba cool nouvelle génération, c’est à dire des larges maillots et des pantalons ambles multicolores, mais sans grosses fleurs propres à cette génération. La seule chose un peu sexy dans leur habillement était les débatteurs possédant un large décolleté qui mettait en valeur leur petite poitrine très ferme. Ces seins formaient deux dunes à l’air libre. Ils n’effectuaient aucun mouvement, même durant les efforts sportifs de leurs propriétaires. Malgré leur petite taille, les hommes les regardaient avec plaisir. Il fallait dire qu’ils étaient parfaits, fermes et tenant bien en main. De plus, aucun bébé n’avait encore abîmé les tétons avec leurs suçons prolongés. Si ces filles avaient eu des pantalons ou des shorts moulants, les regards masculins auraient également portaient sur leurs fesses. En effet, les quatre demoiselles possédaient des « culs » très rebondis. Leurs partenaires sexuels adoraient les prendre à pleine main pour les malaxer durant quelques secondes.

 

La galerie commerciale formait un « L » et possédait deux entrées-sorties à ses extrémités. En son centre se trouvait l’entrée pour la partie marchande. L’endroit était rempli de personnes se bousculant à coup de cadi. Nombreux d’entre eux cherchaient simplement de la fraîcheur.

Dans le hall, le toit de verre laissait passer le soleil qui formait, au travers des différentes poutres métalliques, des halos lumineux sur un sol blanc tacheté. Si on se situait à l’extrémité du hall durant un jour de non-fréquentation, on aurait constaté que les cercles étaient parfaitement alignés. Aujourd’hui, ces puits de lumière mettaient en valeur durant quelques secondes des petits groupes de personnes qui constituaient un serpent sans tête ni queue.

 

***

 

Un jeune homme aux traits fins et à la peau caramel regardait le sol d’une camionnette aux parois blanches. Il tenait entre ses jambes un fusil mitrailleur. Sa respiration était haletante dans une écharpe à l’effigie de la Palestine. C’était sa mère qui l’avait tricoté pour le dernier hiver. Yanis, un jeune de quartier populaire, mal dans sa peau à cause, en autre, d’un manque de but dans sa vie. L’école lui avait tourné le dos par défaut de patience. Il avait, comme la majorité des jeunes étant parmi sa situation, essayé de devenir footballeur professionnel. Yanis mit toute sa volonté dans son nouveau chalenge. Il s’entraînait chaque jour malgré le froid ou la chaleur. De plus, Keltoum, sa grande sœur et la chef de famille à la suite au décès de leur père, l’encourageait le mieux qu’elle pouvait. Malheureusement un jour, le jeune footballeur se blessa gravement au cours d’un match au niveau du tibia. Il subit trois opérations et des dizaines d’heures de rééducation. Malgré cela, sa jambe ne retrouva pas la totalité de ses capacités. Yanis compris par lui-même qui ne pourrait plus jamais jouer au football.

Après trois semaines de dépression, enfermé au sein de sa chambre, il décida de se confronter à la réalité du travail. Pour ce faire, il envoya des dizaines cv aux différentes grandes entreprises régionales. Malheureusement, il n’obtient aucune réponse positive, même auprès des boîtes d’atterrîmes. Le jeune homme se tourna vers la religion espérant trouver des réponses à ses maux de vie. Il alla à la mosquée de « Sous-le-bois ». Malheureusement, il rencontra un islamiste qui repérera tout de suite son mal-être. Cet individu devint rapidement son ami. Il écoutait attentivement ses plaintes en lui apportant toujours des réponses au travers de la religion. Puis, Mohammed, de son prénom de reconversion, le nouvel ami de Yanis, radicalisa son discours. Il mettait en avant le racisme en France. Régulièrement, ses dires étaient les suivants : dans ce pays, on n’est pas les bienvenues. On est rejetés comme si on était la cause de leurs maux. Et chez nous, sur notre véritable terre, on nous considère comme des traites. Nous n’avons plus de véritable maison. De ce constat, je crois sincèrement que les musulmans français devront frapper fort un jour pour changer la situation.

Les semaines passées, et Keltoum voyait, impuissante, son frère se radicalisait, et cela malgré ses nombreuses remarques. Il mettait la tenue traditionnelle chaque jour pour se rendre à la mosquée. Son visage se couvrit d’une barbe hirsute, descendant jusqu’au milieu de son cou. Ses recherches de travail s’étaient totalement interrompues. Seule, sa foi comptait.

 

« On est arrivé. Vous savez quoi faire. Que Dieu vous guide mes frères »

Ces mots résonnèrent dans la camionnette qui ne tarda pas à être remplie de lumière, car les deux portes coulissantes arrière s’ouvrirent brusquement. Les compagnons de Yanis descendirent en premier. Aussitôt à l’extérieur, ils se mirent à tirer sur les passants qui tombaient en grimaçant. La terreur n’avait pas encore fait son apparaissions. Le temps de la stupeur fessait restait immobile les personnes. On se serait dit dans un film au ralenti.

Le jeune homme, encore assis à sa place, regardait cette scène comme un simple spectateur. La mort était déjà présente. Des cadavres se couchaient derrière les voitures qui allaient peut-être perdre leur propriétaire. Dans l’axe de la porte gauche, un petit garçon de quelques années courait vers sa mère tombée sous une rafale de balles. Arrivé à deux mètres d’elle, un projectile atteignit l’arrière de son crâne. Ses pieds décollèrent du sol et retombèrent sur le dos de la femme. Un nuage rouge translucide indiquait la trajectoire de la tête.

Yanis se recroquevilla sur lui-même. Il ne voulait plus y aller. Pourquoi tuer tous ces innocents ? Pour un dieu qui prône le respect envers les non-croyants ?

« Vieux, tu bouges ton cul ou tu comptes attendre l’hiver ici »

Ces dires, prononcés par une voix rock, le ramena à la réalité et tel un robot, il descendit au sein de l’enfer. Le reste de la bande était déjà loin dans la galerie. Yanis passa de la lumière du jour à l’ombre du bâtiment, en suivant un chemin imaginaire créé par les cadavres de tout âge et tout sexe. Il s’arrêta devant une vitrine d’un magasin de téléphones mobiles. Le conducteur de la voiture passa derrière lui et cria :

« Fais ton devoir, mon frère »

Le jeune jeta rapidement un coup d’œil à l’intérieur, puis tira une rafale de balles au travers de la vitre, en prenant garde de viser le plafond. Le verre éclata, puis tomba en cascade sur le sol.

« Continue comme cela »

 

***

 

Julie se promenait lentement dans le rayon surgelé. Elle disait quelques commentaires pour la vidéo.

« Voilà l’évolution de la nourriture. Durant des siècles, nous humain, avons tué des bêtes sauvages. À présent, nous prenons de beaux morceaux de viande congelés »

Elle était sur le point de finir sa réflexion, quand une pétarade lointaine la fut sursautée. Des cris accompagnaient ses bruits. Elle pensa que c’était de jeunes voyous qui claquaient des pétards. Les vigiles devaient sûrement leur crier dessus. Elle continua son chemin, oubliant le fil de ses commentaires. Arrivée dans l’allée principale, elle tourna machinalement la tête vers la gauche. Julie vit avec surprise des gens courir vers elle. Ils avaient l’air tous affolés. Des cris fusaient en tous sens. Cette marée humaine reflétait une panique immense. Des hommes bousculaient enfants et femmes pour passer en premier. On se serait dit un jour de grand solde, mais poussé à l’extrême. Les pétarades s’étaient considérablement rapprochées. Julie pétrifia totalement, bouche ouverte. Elle ne comprenait pas de toute la situation.

« Il ne faut pas rester là, jeune fille ! C’est une fusillade. Fuyez »

Notre héroïne se retourna afin de voir son interlocuteur. Cependant, elle vit que des personnes fuirent. Un puissant coup de feu la ramena à la réalité. Elle traversa en vitesse le rayon d’en face, qui exposait un ensemble de friandises, pour atterrit dans l’allée principale. Elle fit un quart de tour, puis se mit à courir le plus vite possible vers le fond du magasin, c’est-à-dire vers le rayon des boissons, espérant s’éloigner le plus possible des tireurs fous. Mademoiselle Adams se positionna au centre du rayon. Son cœur se débattait parmi sa poitrine. Il lui fessait très mal. Les coups de feu s’approchaient, ainsi que les hurlements et des voix masculines qui criaient :

« Mort à vous, bande de sales porcs »

Julie, dans sa panique, savait qu’elle devait trouver rapidement une échappatoire à cette situation, sous peine de mourir. Elle se força à se calmer, et en même temps à retrouver ses esprits. Pour se faire, la jeune femme respira profondément pendant quelques secondes. Ensuite, alla se placer à l’extrémité du rayon (côté allée centrale). Ce qu’elle vit ne la rassura pas du tout. En effet, des personnes étaient couchées sur le sol, et bien souvent à côté d’une flaque de sang. Elle ne vit aucun tireur, ce qui était évidemment une bonne nouvelle. De plus, on attendait uniquement des tirs lointains. Elle se précipita à l’opposé du rayon. L’allée était desserte. Son regard se posa sur une porte de service située à côté d’un grand volet donnant sûrement dans un hangar. Elle lança des regards attentifs dans toutes directions, espérant de ne voir personne. Elle avança lentement vers la porte, en s’arrêtant à chaque rayon pour vérifier la non-présence d’éventuel tireur. Ses lunettes continuaient à filmer ce moment particulier.

Elle atteignit la porte à bout de souffle, l’ouvrit et

« Ne bouge plus sinon tu es morte »

 

***

 

Yanis continuait à déambuler, en faisant très attention à ne pas croiser l’un de ses amis, dans la galerie marchande, fusille à la main. Chaque fois qu’il croissait des personnes affolées, il fessait signe de partir vers la sortir. Le jeune homme ne pouvait pas tuer des innocents, c’était plus fort de lui, même s’il avait été formé pour. Déjà la veille au soir, dans son lit, il ne savait plus s’il devait vraiment y aller. Il s’imaginait en train de tenir en joue un innocent, avoir sa vie à portée de canon. Même si mon ami m’a appris que c’était des ennemis au travers de leur non-croyance et surtout de leur racisme envers nous. Cependant, les généralités nuisent aux personnes concernées, en plus d’être infondées. Les blancs ne sont pas tous de furieux racistes voulant à tout prix nous jeter dans la Seine. Je crois avant tout qu’ils sont manipulés par les médias. Ces derniers montrent toujours le mauvais côté des banlieues, c’est-à-dire les viols, la drogue, les voitures brûlées et les meurtres. Ces gens ont une famille, une vie, tout comme moi. Je ne peux pas les tuer, c’est impossible.

Tout en errant devant les différentes vitrines, Yanis tirait de temps à autre une rafale de balles en l’air pour donner l’illusion de tuer des personnes. Lorsqu’il rencontrait l’un de ses camarades, ce dernier prenait un malin plaisir à lui dire le nombre de personnes qu’il avait tuées. Notre faux tueur répondait toujours par un nombre inférieur. Sur ceux, ses amis le motivaient par ces mots :

« Va y frère, tu peux faire mieux »

L’homme répondait par un simple sourire gêné.

À aucun moment, il avait pensé comment cela allait se terminer. Notre héros était pris dans une spirale infernale. Les événements s’enchainèrent de façon automatique, et aujourd’hui il était là, tenant une machine à tuer, sans savoir quoi faire. Se sauver ou rester.

« Ramène-toi ! On a des otages »

 

***

 

Un groupe d’otages était regroupé dans la réserve du magasin. Julie se trouvait parmi eux. Tous portaient la peur sur leur visage. Ils formaient un cercle au milieu d’une grande allée fait de hautes étagères remplies de cartons de toute taille. On ne pouvait pas voir les rayons voisins. Cela donnait une sensation de confinement, malgré la largeur du rayon. Trois personnes armées étaient positionnées aux extrémités. Sous les tôles semi-transparentes recouvertes de mousse naturelle régnait une chaleur étouffante. Les otages transpiraient à grosses gouttes dans un lourd silence.

Pas un mot ne sortait de leur bouche. Chacun regardait le sol, à défaut d’un visuel d’atterré. Des gouttes de sueur tombaient sur le béton gris foncé, et formaient des petits cercles.

Toujours en silence, un groupe armé dispersa calmement les otages au sein de plusieurs rayons. Ils obéissaient sans aucune résistance. Julie se retrouva en présence de Yanis.

 

***

 

Julie n’osait pas regarder son preneur d’otage qui était Yanis. Elle ressentait un mal-être de la part de l’homme. Il effectuait les cent pas dans l’allée, tout en marmonnant des dires incompréhensibles. Son état nerveux ne rassurait pas de tout la jeune femme, d’autant plus qu’il tenait une arme dans les mains. Elle décida de commencer une conversation, histoire de détente l’atmosphère :

« Bonjour, comment t’appelles-tu ? »

« Ma religion m’attendit de parler aux femmes non musulmanes »

« J’en déduis que vous avez tué au nom de l’islam »

Yanis acquiesça de la tête, sans regarder la femme.

« Je croyais que c’était une religion pacifique »

« Exactement, mais lorsqu’on n’est pas respectés, un moment il faut prendre les armes, sinon on se fait écraser comme des insectes »

« Nous ne sommes pas tous des racistes en puissance. Malheureusement, il y en a. cependant, il ne faut pas généraliser. C’est comme si je disais que tous les musulmans sont des terroristes »

Yanis était sur le point de répondre, quand une voie rock se fit entendre derrière lui :

« Yanis ! Tu fais quoi là ? On n’a pas le droit de parler avec une femme. Elles incarnent le sheitan. Reprends-toi mon frère »

Le jeune homme tourna le dos à la femme et ne prononça plus un mot.

 

***

 

La nuit plongeait la réserve dans la pénombre. Tout était d’ombre. Les yeux fatigués avaient de grandes difficultés à distinguer les détails. La chaleur continuait à faire couler la sueur sur les visages des otages toujours répartis au sein des rayons.

Tout le long de l’après-midi, la police avait tenté de prendre contact avec les terroristes, mais en vain. Les ravisseurs ne possédaient pas de téléphone portable.

 

Julie était toujours avec Yanis, plongée parmi un lourd silence. À plusieurs reprises, la jeune femme avait tenté de se connecter sur internet grâce à ses lunettes pour envoyer des messages rassurants à ses proches, et peut-être même fournir des renseignements à police. Malheureusement, les WiFi n’arrivaient pas jusqu’à là. Par conséquent, en but de passer le temps, elle avait essayé à maintes reprises d’entamer une conversation avec son gardien. Cela était semblable à parler à un mur. Son but était de combler son esprit pour ne pas penser à la mort.

 

 

La nuit tombée, les deux individus étaient toujours ensemble, plongés au sein d’un lourd silence. La pleine lune éclairait, au travers des tôles semi-transparentes, l’endroit d’une lumière blanchâtre. Si la situation ne se voulait pas être si dangereuse, les personnes ici présentes, auraient pu se laisser croire, avec un peu d’imagination, se trouver au sein d’un lieu romantique.

La police n’avait pas arrêté de faire passer un hélicoptère au-dessus de l’entrepôt. Chaque fois, un tube lumineux illuminait tous les individus à tour de rôle, découvrant ainsi des visages apeurés. Chacun ne savait pas s’il allait revoir ses proches. Leur vie défilait devant eux comme un film en accéléré. Les bons moments, ainsi des mauvais, passaient à une vitesse effrayante. On aurait dit que la touche avance rapide avait été actionnée. Leur existence pouvait prendre fin par une simple pression sur une gâchette, propulsant ainsi un petit bout de métal. Une vie ne tient à pas grand-chose.

 

Julie pris en toute discrétion, de sa poche, un mini bloc-notes jaune et un crayon multi couleurs. Elle choisit le coloris bleu, puis commença à écrire :

« Certes, tu ne peux pas parler aux sexes faibles, mais tu peux leur écrire ? Non ! »

La femme forma une boule avec la feuille retirée du carnet, la lança sur la tête de Yanis qui se retourna tout surpris. Dans son regard rageur, il vit Julie lui faire signe de déplier la feuille. Il s’exécuta. Les mots firent apparaitre un léger sourire vite effacé de peur que quelqu’un le voie. À cette vue, la demoiselle fit rouler son stylo sur le sol. Un pied masculin enfermé dans une chaussure couramment appelé basket stoppa le crayon. Il hésita un instant, puis le ramassa et finalement noircis quelques lignes avec ses mots :

« Ma religion m’interdit toute forme de communication avec une femme »

La feuille fut repliée et renvoyée à l’expéditeur. Julie le regarda avec un air faussement boudeur, en baissant la tête vers l’avant. L’homme ne put s’empêcher de sourire de nouveau. Il regarda au tour de lui, puis s’approcha de son otage.

« Tu vas bien ? Tu n’as pas soif ? »

« Tu me parles ? Fais attention à ne pas aller en enfer »

« Ne te moque pas de ma religion. Même si tu es hâté, respecte au moins mon dieu »

« Tu as raison. Excuse-moi »

« Nous ne sommes pas si mauvais que ça, tu sais. Nous souhaitons simplement montrer aux non-croyants que nous ne sommes pas des monstres »

« En tuant ! »

Yanis se rapprocha de l’oreille féminine.

« Je n’ai tué personne. J’aurais dû les empêcher, mais je ne voulais pas mourir. Je veux revoir ma famille. Tu vas me dire que j’aurai dû y réfléchir avant. Cependant, un faux bonheur apparut dans ma vie assombrie à cause du décès de mon père et le fait que je ne trouve pas de travail. Un ami m’a fait découvrir l’islam radical. Je me suis réfugié dedans sans réfléchir. J’avoue, j’ai peur de la fin des événements »

« Tu peux te rendre à la police »

« Si je fais cela, ils me tueront, car je serais un traitre. Je veux absolument revoir ma mère et ma grande sœur »

« Tu n’es pas comme les autres. Tu as un bon fond »

« Tu sais, ils sont tous comme moi. C’est simplement des jeunes qui n’ont pas trouvé leur place dans la société »

« Ils ont tué des gens, pas toi »

« La vie les a rendus plus durs. Et certains d’entre eux n’ont plus d’attache dans ce monde »

« Tu n’as aucun plan pour sortir vivant de cet endroit ? »

« Non ! D’un côté, il y a mes amis qui me tueraient si je me sauve. De l’autre côté, les policiers risquent de m’abattre »

« On pourrait monter un plan pour s’évader à deux »

Ils continuèrent à discuter en cachette durant une heure. Ils firent connaissance. S’apprécièrent, tout en pensant qu’ils pouvaient devenir amis en dehors de cet endroit. En profondeur, ces deux individus n’étaient pas si éloignés. Ils étaient deux jeunes personnes voyageant dans la même époque et ayant beaucoup de bonté. Julie avait également passé une mauvaise période, au moment où son père lui refusait l’accès aux études d’art. À cette époque, elle commença à se droguer pour oublier ses problèmes, certes pas grave aux yeux de la majorité des gens, mais importants pour elle. Les joints faisaient que passer. Elle était presque tout le temps dans un état second, jusqu’à son entrée en école d’art.

 

Les deux jeunes évoquèrent leur amour envers leur famille respective. Ils avaient envie encore de partager des moments en présence de leurs proches, tout en se sentant aimer. Selon eux, la vie les n’avait pas encore transporté assez loin. Durant le voyage, le vrai amour ne l’avait pas encore frôlé.

 

***

 

Vers minuit, alors que Julie et Yanis parlèrent à voix basse pour continuer de faire connaissance et de passer le temps, un fumigène éclata près d’eux, en produisant un flash assourdissant. Les otages se jetèrent à terre aussi vite que possible. La panique fit son apparition au travers des cris accompagnés par des coups de feu. Les deux jeunes se blottirent l’un contre l’autre. Julie sentait le corps masculin contre elle. Ses yeux pleuraient tous seuls à cause de la fumée. Son souffle court s’entrecoupait de toux qui la fessait cracher sur le sol en béton. Malgré la proximité, elle ne voyait pas l’homme qui tentait de la protéger avec son propre corps, et cela même la courte durée de leur connaissance. Elle avait l’impression qu’il pleurait, car spammes le secouer. De plus, les derniers dires de l’homme arrivaient à son oreille :

« Maman, grande sœur, je vous aime »

 

***

 

Julie était agenouillée devant une tombe, encadrée de deux femmes qui pleuraient. Sur la pierre, on pouvait lire :

« Un jeune homme victime de la société »

 

Un éternel égoïste

Un éternel égoïste

J’avançai dans les rues parisiennes où une forte pluie d’automne tombait depuis presque d’une semaine. Les rigoles étaient transformées en lit de petits ruisseaux. Ces derniers transportaient des feuilles jaunies ou rougies par la baisse de la sève. Elles se faisaient ballotter en tous sens par les flots qui formaient des géantes vagues, comparées à leur taille. Ces minuscules rivières terminaient leur chemin dans une des innombrables bouches d’égout de la ville. Là, nos traits d’eau rencontraient leurs semblables, puis cet ensemble formait une rivière souterraine insalubre. Elle coulait tranquillement parmi le noir et la puanteur. Sur les rives surélevées, des rats regardaient, avec appétit, passer les déchets des humains. Pour eux, ces détritus constituaient leur met. Cette eau marron foncé terminait son chemin en se jetant au sein de la Seine. Cette dame menaçait de se répandre dans les rues, comme au début du siècle dernier, et par conséquent propager des maladies. Le fleuve donnait une impression de puissance, au travers de son volume et de sa rapidité de mouvements. Des troncs d’arbres constituaient les uniques objets naviguant sur cette succession de tourbillons et de vagues. Les passants regardaient ce spectacle en ressentant une angoisse grandissante.

Dans la rue où je me trouvais, de nombreuses flaques reflétaient vaguement le ciel de coton gris très foncé, limite noire. Le firmament obscurcissait la lumière naturelle, donnant l’impression d’être plongé à l’intérieur d’un film en noir et blanc ou une bande dessinée dépourvue de couleur. Les hautes habitations situées de chaque côté de la rue renforçaient grandement ce ressentiment. Ils témoignaient la longue histoire de cette magnifique ville. Les personnes attentives, et un peu rêveuses, pouvaient encore entendre le bruit des sabots frappant les pavés sales, sentir la puanteur des ruelles dangereuses, ou apercevoir d’élégantes femmes en longue robe.

Même les passants contribuaient à cette noirceur avec leurs vêtements sombres. Cependant, ce tableau s’appropriait de quelques couleurs au travers de grands parapluies servant comme habitation précaire. Leur coloris apportait une légère gaîté dans cette morosité ambiante qui se voyait très bien sur la quasi-totalité des visages.

Personnellement, j’étais submergé par un bonheur simple. Je venais d’acheter un très bon roman, et j’avais hâte de le lire face à un feu de cheminée, en écoutant la pluie frapper mes vitres. Cette musique me détendait, puis me transportait loin de la réalité. Durant cette nuit, je voyagerais au fil des pages, espérant que Paris soit inondé demain pour que mon bien-être se prolonge durant quelques jours. Si cela arrivait, j’aurais le silence comme ami. Mon fauteuil mono place glisserait vers les carreaux du salon, m’offrant vue sur ma rue. Des litres de café seraient préparés et mis à mes pieds. Et le paquet de cigarettes se trouverait sur le rebord de la fenêtre entrouverte, laissant ainsi passer un filet d’air frais. Il se mêlerait avec la chaleur intérieure, donnant une enveloppe tempérée et respirable. Pour finir, je me risquerais à penser à mon bonheur égoïste constitué par le fait que je sois au chaud pendant cette période pluvieuse.

L’atmosphère de l’automne m’avait pénétré, puis retirait toutes mes mauvaises pensées. Tout me paraissait beau sous cette pluie. Les feuilles multicolores tombaient dans les parcs sur les promeneurs venus admirer l’agonie de dame nature. Elle s’accompagnait anormalement de jolies couleurs appartenant à la gamme des oranges. Cette mort était belle visuellement et de façon ressentît, car chacun savait que la nature renaîtrait l’année prochaine. Cette fin de vie produisait une agréable odeur faisant voyager imaginairement, un peu comme une drogue. Encore une fois, c’était l’opposé du trépas traditionnel.

Je voulais absolument profiter de ce moment, au même titre d’une séance de bronzage sous un soleil brûlant. Cette ambiance me rappela ma jeunesse, plus précisément mon rêve d’aller faire Halloween au sein d’une petite ville américaine. Je me serais promené dans les rues, habillé en vampire. Mon parquet de bombons presque vide serait agité par un vent nocturne provenant des arbres orange. La lune éclairerait faiblement mes pas, entre deux nuages filant à toute allure vers l’horizon. Je m’amuserais à me faire peur en pensant qu’un tueur d’enfants rôderait. Me connaissant, j’aurais fait tout mon possible pour rester toute la nuit dehors.

Me voilà arrivais en bas de mon immeuble.

 

Je pénétrais mon salon, tout mouillé. Mes pieds caressaient la moquette foncée qui sentait, comme chaque élément de la pièce, fortement la fumée de cigarette froide. J’allumai l’ampoule nue, à l’aide d’un petit interrupteur à levier. Elle se trouvait au centre d’un cercle formé par des roses moulées dans le plafond blanc. La forte lumière blanche mit en valeur une vingtaine de piles de livres, hautes d’environ un mètre. Parmi ces tours, un fauteuil d’une place effectuait un tête-à-tête avec une cheminée ouverte. Des petites fleurs bleues posées sur un fond marron foncé le décoraient. L’assise comportait une longue éventration. Elle laissait sortir une grosse mousse jaune poussin. On ne voyait pas les murs pour cause de présence d’étagères en bois comportant des centaines de livres. Une unique fenêtre jaunie par la fumée donnait vue sur un haut bâtiment datant du dix-huitième siècle. En bas, on apercevait, au travers des gouttes d’eau, une étroite ruelle peu fréquentée.

Mon compagnon se nommait William. Il était parti en déplacement pour son travail à Marseille durant trois semaines. On vivait chacun dans son propre appartement. Et lorsqu’on l’envie d’un câlin ou le manque d’affection se faisait sentir, l’un allait chez l’autre passer deux trois jours. Ensuite, chacun repartait chez lui. Je ne ressentais pas d’amour envers lui. Il me servait uniquement à assouvir mes besoins naturels, au même titre de la nourriture. Je voyais son amour pour moi, mais cela ne me faisait ni chaud ni froid.

J’allumai la cheminée, puis me plongea parmi un bain bien chaud. À ma sortie, une pénombre nocturne habitait mon salon. Le feu mourait doucement. Il se résumait à des braises rouges. Je me hâtai de mettre une buche pour le ramener à la vie. Des flammes jaunes séchèrent mon corps nu, en me faisant frissonner. Une fois entièrement sec, j’enfilai un gros peignoir éponge, puis mangea rapidement un bol de soupe verte accompagnée par des tartines beurrées.

Après le dîner, le fauteuil fut poussé sous la fenêtre peu ouverte. Cet endroit allait devenir mon paradis pour les heures avenir. Deux agréables bruits brisaient le silence : le ronronnement du feu, et la pluie sur les carreaux. Une lampe de bureau posée sur le rebord de la fenêtre éclairait les mots.

 

Je lus durant toute la nuit, voyageant au gré de l’histoire. Mon bonheur était à son comble, malgré la fatigue. Je ne voulais absolument pas de cet instant s’arrête.

Au petit matin, mon regard embrumé scruta la ruelle, espérant de voir une rivière. Le soleil m’aveugla. Les pavés étincelaient comme des étoiles. J’ouvris la fenêtre pour regarder la couleur du ciel. Un air frais saturé par une senteur de feuilles mortes humides me tonifia et me fit frissonner. Les oiseaux chantaient sur un fond bleu.

Très déçu, je me levai et pénétrai ma salle de bain, nu. Pris un revolver, puis retourna à mon lieu de départ. Posa l’arme froide sur ma tempe. En ressentant une grande joie d’avoir trouvé un remède à ma déception, je dis à voix haute :

« Que mon bonheur égoïste ne soit plus sali par la vie »

J’appuyai sur la gâchette. La joie éternelle commença.

Des vacances à l’ancienne

Des vacances à l’ancienne

Dorian regardait, assis sur la terrasse de la maison, un magnifique paysage bourguignon. Ce visuel se composait de collines pas très hautes couvertes soit par des bois sombres soit par des champs colorés avec un jaune très clair, limite éblouissant. Entre deux coteaux se trouvaient des pâtures où parfois des vaches broutaient paisiblement dans l’air chaud du mois août. Ces zones d’herbes se délimitaient avec des filles barbelées non visibles à cette distance. L’ensemble des couleurs de ce décor respirait la gaieté, tout comme ce moment de l’année. Au loin, une route peu fréquentée zigzaguait sur les différentes collines. Elle représentait l’unique activité humaine. De temps à autre, un nuage passait rapidement devant le soleil, produisant ainsi une ombre qui courait sur cette nature.

Le garçon avait treize ans. Il possédait une chevelure châtain claire. Elle lui couvrait ses oreilles et son front. De jolies bouclettes rendaient cette coiffure brouillonne et lui donnaient une allure de skateur, tout comme ses habille : un t-shirt trop large décoré d’une jolie surfeuse, et un baggy bleu claire lui descendant en bas des fesses laissant apparaître un caleçon à grosses fleurs rouges d’Hawaï sur un fond vert. Son visage semblait être bloqué entre l’enfance et l’adolescence. Ses joues étaient encore rondes (sa silhouette aussi) et couvertes de taches de rousseur. Cependant, à présent, il y avait quelques boutons à pointe blanche. Son regard ressemblait fortement à celui d’un chat : yeux verts en amande. Son nez, légèrement trop épaté, lui donnait un charme pour l’instant encore enfantin. Sa bouche pulpeuse apportait une touche de féminité.

La joie dominait ses sentiments, car le lendemain il partait en vacances dans le var. Cette année, son père avait eût la bonne idée de proposer au reste de la famille des vacances à l’ancienne, loin des nouvelles technologies. Ils acceptèrent avec plaisir, surtout Dorian qui se voyait déjà vivre de grandes aventures exactement comme dans les livres de Pagnol. De plus, il ne ressemblait pas à la quasi-totalité des enfants de son âge. Le jeune garçon n’aimait pas passer des dizaines d’heures sur un ressaut social ou devant un jeu vidéo. Il adorait se promener seul dans la nature pour découvrir de nouveaux animaux ou de nouvelles plantes, en général, car parfois il partait dans des aventures imaginaires. À l’école, il possédait quelques amis, tous des rêveurs comme lui. Ils discutaient principalement de leurs livres lus.

Dorian alla finir ses derniers préparatifs pour le voyage.

 

Le repas du soir se déroula au crépuscule. La famille se trouvait au centre du salon qui se voulait être moderne au travers de ses couleurs : fuchsia et gris. Des lampes électriques enfoncées dans le plafond diffusaient une douce lumière. Elles créaient des points lumineux sur les grands carrelages noir anthracite. À gauche de la table couverte par une plaque en verre, se trouvait un escalier sans rambarde et menant aux chambres. Face à la première marche, une petite fenêtre laissait voir le même paysage qu’on pouvait admirer sur la terrasse. En dessous de l’escalier, une ouverture en demi-lune avait été faite dans le mur. Elle donnait vue sur la cuisine.

Tout de suite après le repas, ils allèrent se coucher dans une bonne humeur générale.

 

À cinq d’heure du matin, Dorian s’installa sur le siège passager pour au minimum les six heures avenir. Il regardait paisiblement les lumières des villes encore endormies au sein de cette belle nuit d’été. Les routes ne s’encombraient pas encore avec les traditionnels bouchons estivaux.

Dorian sombra dans un profond sommeil une heure après le départ et se réveilla seulement dix minutes avant d’arriver à destination.

Dans son regard embué, des vignes parcouraient des collines dont leur sommet était formé par des roches apparentes. Entre deux vignobles, des oliviers ombrageaient le sol qui se couvrait avec de gros cailloux.

La voiture longeait un profond ravin contenant quelques arbres brûlés. À l’opposé, un mur de roche donnait l’impression d’être poussé vers le vide. Après cinq minutes à se faire balloter à cause du mauvais état de la route, la famille arriva dans l’impasse où se trouvait la demeure des vacances. C’était une imposante maison de forme cubique. Elle possédait cinq fenêtres réparties sur deux étages. Chacune s’occultait avec des volets composés par lamelles en bois peint en blanc, tout comme la totalité des murs. Cet ensemble se voulait être très propre. La porte apportait quelque chose de marin au travers de son bleu foncé. Cette entrée ne comportait aucune marche. Elle était devançait par une avancée en béton d’une largeur d’une dizaine de centimètres. Quelques cailloux s’y trouvaient. À gauche de la porte, une porterie en forme de cigale multicolore apportait une gaieté visuelle. Les tuiles rouge sang du toit tranchaient nette avec le bleu du ciel. Cette habitation s’entourait par les éléments suivants : derrière et à droite, à cinquante mètres des murs, on pouvait admirer un empilement de rochers qui empêchait de voir l’horizon. À gauche, un vertigineux ravin devançait une série de collines habillées de vignes. Devant, une place couverte de graviers blancs permettait aux voitures de se garer. Aucune barrière ne la fermait. En son centre, une cabane en bois faisait office de toilette.

Cette maison appartenait à un couple d’amis. Ils étaient partis en vacances à l’étranger et avaient seulement demandé de sortir les fleurs, puis s’en occuper.

La famille descendit les valises et pénétra dans la bâtisse.

La fraîcheur du lieu impressionna Dorian. Le contraste entre la chaleur étouffante de l’extérieur et la fraîcheur de l’intérieur donnait la sensation d’entrer dans un frigidaire. La pénombre avait élu domicile. Trois traits lumineux passaient par des trous dans les volés, et formaient des cercles lumineux sur le mur d’en face. Une forte odeur de renfermer força la famille à ouvrir la totalité des fenêtres pour créer un courant d’air. En même temps, la lumière dévoila l’ensemble des pièces. Tous reprenaient le style du début du vingtième siècle. La cuisine comportait un poêle à charbon, la salle à manger possédait uniquement des meubles taillés dans un vieux bois, et chacune des chambres renfermait uniquement un lit et une garde-robe. Les autres endroits étaient fermés à clef. Il n’y avait pas de salle de bain, on pouvait se laver soit avec une bassine dans la cuisine soit sous une douche qui se trouvait à l’extérieur, à côté des toilettes.

 

Trois jours après son arrivée, Dorian décida d’aller explorer les environs. Il prépara son sac avec des provisions : une boussole, une carte, un couteau suisse et plusieurs autres outils. Après les traditionnelles recommandations de sa mère, il prit un étroit chemin terreux montant une colline. Il se bordait de hautes herbes complètement jaunies par le soleil. Les cigales chantaient le bonheur du sud dans une chaleur déjà écrasante. Les grosses chaussures de marche du jeune garçon faisaient craquer les cailloux jonchant la terre complètement sèche, réduit presque en état de poussière.

Notre héros se sentait complètement en vacances et dans son élément. Le bonheur régnait parmi son esprit.

À midi, il s’arrêta dans une plantation d’oliviers pour se restaurer à l’ombre. Il sortit de son sac un sandwich au jambon et une bouteille d’eau fraîche. En guise d’entrée, Dorian se prépara une omelette avec des œufs d’oiseaux récemment ramassés. Pour se faire, il alla s’assoir à côté d’une grosse pierre plate se situant en plein soleil. Regarda si elle était bien brûlante, puis la nettoya à l’aide d’un chiffon sec. Le cuisinier la saupoudra de poivre et de sel. Cassa les six œufs sur la plaque de cuisson naturelle. À leur contact, le liquide transparent se transformait en chose solide blanche, dans un léger bruit de crépitation. Une fois la totalité des cotyles fut vidée, le garçon déversa un peu d’herbes de Provence sur l’omelette. À la suite de ce bon repas, il décida de faire une petite sieste avant de reprendre la route.

 

Vers quinze heures, Dorian passa devant une veille demeure totalement en ruine et envahi par la végétation. Elle était haute, mais pas large. Elle ne possédait ni de fenêtres et ni de porte. Les murs extérieurs se faisaient totalement couvrir par de hautes plantes vertes, tout comme le parterre du devant. Aucune barrière ne gardait cette habitation.

 

« On raconte dans la région que cette demeure est hantée par un homme qui vivait au moyen âge et qui manger les enfants pour, selon lui, gardait sa jeunesse éternellement »

Ces dires effrayèrent Dorian. Il fit un demi-tour si rapidement qu’il faillit tomber. L’aventurier vit un vieil homme assis sur un banc en pierre. Cette assise formait un toit pour de hautes herbes. Sa peau avait été vieillie prématurément par le soleil. De nombreuses taches plus foncées parsemaient son visage, ses bras, ses mains et ses jambes. Ses mains possédaient de grosses veines bleues. Le temps avait creusé des ruisseaux asséchés dans son visage et blanchit ses cheveux coiffés à l’arrière comme les anciens rockeurs. Deux yeux bleus regardaient tendrement l’enfant. Le vieillard portait un débardeur blanc et un short vert uni. Il se recroquevillait sur une canne maintenue par ses deux mains posées l’une au-dessus de l’autre. La deuxième extrémité du bâton se trouvait entre ses pieds protégés par des sandales en cuir marron, et posait sur de gros cailloux.

« Je suis désolé d’avoir fait peur mon petit, ce n’était pas de tout mon but »

« Ce n’est pas grave monsieur. Je pensais juste que j’étais seul »

Les deux individus discutèrent à propos de la maison durant dix minutes, puis Dorian reprit son chemin en pensant qu’il allait sûrement revenir ici durant une nuit pour visiter la demeure. Il aimait tout ce qui touchait au paranormal, même s’il ne croyait pas au fantôme. Ces phénomènes lui procuraient des frissons. Le jeune garçon visitait régulièrement des lieux soi-disant hantés, mais il n’avait jamais vu de choses inexpliquées à ce jour.

 

Vers dix-huit heures, le ciel se couvrit d’un énorme nuage noir, assombrissant fortement la luminosité. On se croyait au crépuscule d’un jour pluvieux. Le vent se souleva rapidement. La végétation morte vivotait et parfois venait frapper le visage de Dorian. Le marcheur se trouvait sur un étroit chemin terreux. Il serpentait une haute colline. Le randonneur rechercha, en courant, un endroit pour s’abriter de la future pluie qui, à juger la noirceur et la grosseur du nuage, allait être forte. Dans un virage, il vit un renfoncement dans la paroi. Le randonneur sortit sa lampe de poche, ensuite éclaira l’endroit. C’était une sorte de petite grotte très sombre. À peine entré, son téléphone portable (sa mère l’avait obligé à le prendre pour plus de sécurité) sonna. Évidemment, c’était sa maman qui l’appelait, car, à la vue de l’orage, elle s’inquiéta pour lui. Après l’avoir rassuré, il s’assit sur un rocher, au bord de la caverne.

À l’extérieur, la pluie formait un rideau presque opaque. On ne voyait plus les collines qui formaient une profonde gorge. L’eau refroidissait le sol, en produisant une agréable odeur transportée par un violent vent. Il hurlait, donnant un côté sinistre à la scène. Des feuilles et des petites branches passaient et repassaient devant la grotte. Toutes les dix secondes environ, un éclair mettait en valeur chaque élément du paysage durant une centaine de millisecondes, puis un vacarme montait rapidement dans la grotte. La chaleur avait totalement disparu pour laissait place à une fraîcheur appartenant à une soirée printanière. Cette sensation était renforcée par les parois. Dorian frissonnait assis, les bras croisés, toujours sur la même grosse pierre. Il regarda autour de lui et constata qui avait de nombreux branchages à même le sol. Il les ramassa pour former un tas. Ensuite, il réalisa un cercle sur le sol à l’aide de grosses pierres. Plaça le bois en son centre. Sortit quelques vieux journaux de son sac et les mit en boules sur le bûché. Pour finir, le nouvel homme des cavernes gratta une allumette et enflamma une boulette. Aussitôt, une flamme naquit. Elle grandissait fur et à mesure qu’elle se nourrissait. Son évolution s’accompagnait de craquement et d’étincelles. Le vent poussait vers le fond la fumée blanchâtre. Dorian respirait l’air frais, tout en profitant de la chaleur de son feu. Il avait l’impression d’être enfermé dans cocon lumineux.

Une demi-heure après, le soleil réapparut, ainsi que la chaleur. Le jeune garçon prit la route du retour dans une nature détrempée. La végétation se décorait de colliers en perles liquides qui brillaient au soleil. Les trous dans la route étaient remplis d’eau. Elle renvoyait l’image d’un ciel encore nuageux.

En arrivant à la maison, il vit ses parents assis sur des sièges blancs et en train de boire un verre de rosé glacé. Ils l’accueillirent avec un sourire.

 

Deux nuits plus tard, Dorian décida d’aller visiter la demeure soi-disant hantée, en cachette (afin de ne pas inquiéter inutilement sa mère). Pour se faire, il se fit un support de descende en nouant les draps entre eux. L’Attacha fermement à l’armoire en bois massif qui pesait une centaine de kilos. Le jeune garçon descendit la façade en rappelle, comme il avait appris dans son club d’escalade.

À présent, l’aventurier marchait dans la nuit, entouré par des cris d’animaux nocturnes. Dorian ne comprenait pas la peur de certaines personnes dans une situation semblable. C’est juste des chouettes ou des grenouilles, et non des monstres assoiffés de sang. Une légère brise faisait un peut bouger ses cheveux et descendait la température de deux ou trois degrés. Il avait hâte d’entrer au sein de la maison pour ressentir la traditionnelle peur lorsqu’on est face à l’inconnu.

Le chasseur de fantômes arriva devant le lieu-dit. La lune éclairait d’une lumière blanchâtre la bâtisse. Il pénétra dans les hautes herbes qui devançaient l’entrée. Il voyait à peine l’entrée. Arriva avec difficulté dans l’endroit voulu. Une forte odeur de moisi l’écœura presque. Sa lampe de poche balayait de gauche à droite les éléments suivants : un escalier troué, un placard sans porte, un couloir fini par lumière blanche, et une porte cassée encadrée par un mur couvert avec un papier peint blanc parsemé de minuscules fleurs bleues. Dorian fut naturellement attiré par la source de lumière. Le garçon avança vers elle, tel un zombie. Pour aucune raison apparente, il se sentait hypnotisé. Traversa une cuisine insalubre sans même y faire attention, puis, en passant par une porte située à droite d’un évier, arriva dans une serre collée à la maison. Les plantes sauvages envahissaient l’endroit. La majorité d’entre elles montait jusqu’au toit en verre qui laissait passer les rayons de la pleine lune. Une chaude odeur de terre réveilla un peu Dorian. Il avança de quelques pas pour mieux apprécier l’endroit. Des feuilles lui caressaient les joues, tout en laissant un peu d’humidité. Soudain, entre les plantes, il aperçut une petite sphère bleue qui semblait voler. Il écarta rapidement le feuillage. En effet, une chose lumineuse se trouvait à quelques mètres de lui. Elle s’amusait avec des insectes. Rempli de curiosité, Dorian s’approcha doucement d’elle. Le point lumineux le vit et aussitôt il vint tournoyer autour de sa tête. Le jeune garçon commença un mouvement de recul, mais l’entité lui fit comprendre qu’elle n’était pas dangereuse, grâce sûrement à ses légers sifflements très mélodieux. Elle le frôlait en lui procurant une douce chaleur.

Dorian était presque sûr qu’il se trouvait devant à un phénomène paranormal et qu’il devait, par conséquent, en profiter au maximum. Il la regarda attentivement pour voir si ce n’était pas un insecte. Il constata que cette chose volante était transparente et parfaitement ronde. Par conséquent, ceci ne pouvait pas être un être vivant. Elle continua à tourner autour de sa tête pendant une dizaine de secondes encore, puis s’éloigna rapidement, en produisant un fort sifflement. Le garçonnet se mit à courir parmi la végétation pour le suivre. Des épines lui éraflèrent les mollets et firent couler quelques larmes de sang. Étant absorbé par le surréalisme de la scène, il ne sentait pas la douleur. Subitement, les plantes cessèrent de lui cachaient la vue. Il se trouvait au centre d’un cercle couvert de terre sans aucune végétation. La sphère bleue fit trois petits cercles, puis pénétra le sol. Dorian tapa avec son pied, de façon irréfléchie, à l’endroit même où elle avait disparu. Un bruit métallique se fit entendre. Il éjecta un peu de terre avec sa chaussure. Une plaque métallique apparut à la lumière blanchâtre. Durant qu’il enlevait le reste de la terre avec ses mains, il découvrit une poignée. La tira et la trappe se souleva facilement. Un trou apparut avec l’entité bleue au fond. Elle éclairait faiblement un sol boueux. Grâce à sa lampe, il découvrit une échelle attachée à la paroi. Toujours sous l’effet de la découverte, il descendit par la trappe avec prudence. Une fois en bas, il fit un demi-tour sur lui-même, tout en recherchant son étrange guide. Le faisceau lumineux éclaira une vaste pièce comportant deux grandes tables en bois, et de nombreuses étagères remplies de livres dont leur couverture était tous en cuir. L’air se saturait d’une odeur de terre sèche. Cela était presque suffocant. De plus, la chaleur rendait la situation plus pénible la situation. La lumière bleue se trouvait entre les tables. Elle resta immobile pendant une dizaine de secondes, puis se mit à vivoter et à émettre des sons aigus devant une armoire, comme pour désigner une chose précise. Dorian comprit le message, sans même savoir comment. Il avança vers les livres et naturellement, en prit un. Son volume était semblable à celui de la bible. Le futur lecteur le posa sur l’une des tables. En le feulant, il vit des schémas représentant l’anatomie des enfants. L’histoire du vieillard lui revint en tête. La peur le gagna. Il réalisa que cette chose agréable à la vue était peut-être l’esprit du monstre tueur d’enfants. Ses jambes tremblaient, tout en emmenant le reste du corps vers la sortie. La lumière bleue se posa sur une page et ne bougea plus, comme si elle voulait montrer sa non-violence. Le garçon arrêta nette sa fuite. Avança avec prudence vers la table, en pensant que si les choses tournaient mal, il aurait qu’à s’enfuir, en espérant tout de même que les portes ne se ferment à clef toute seule devant lui. Il lut à voix basse le texte mis en valeur par son nouvel ami. C’était des instructions pour opérer un jeune patient d’une tumeur au cerveau. Il tourna rapidement les pages et constata que ce livre avait pour thème les opérations d’enfant. Le garçon alla prendre d’autres livres sur les étagères. Tous possédaient le même sujet que le premier. Dorian compris que l’homme qui vivait ici opérer les enfants malades et ne les faisait pas mourir par sa propre volonté. Il semblait être sur point d’essayer de dialoguer avec le fantôme, mais il disparut. Notre jeune héros regarda en tous sens pour le rechercher. La pièce était totalement vide. Plus d’armoires, ni de tables. Il se trouvait au sein d’une sorte de cave. Toujours à la recherche de l’esprit, le chasseur de fantômes remonta dans la maison et parcouru chaque pièce, en vain. Il se mit à penser qu’il venait être victime d’une hallucination, sûrement à cause d’un manque d’oxygène dans le trou. Ou un phénomène paranormal venait se dérouler devant ses yeux. Il ne possédait aucun moyen de le savoir, par conséquent il lui restait plus d’aller se coucher en repensant à ce qu’il venait se passer.

 

Deux jours après cet évènement, Dorian demeurait toujours perplexe. Il ne savait pas si cela c’était vraiment passer. Évidemment, il pouvait y retourner pour avoir le cœur net. Cependant, une légère peur l’empêchait de s’y rendre. Le garçon se disait que cette chose avait été gentille, mais la prochaine fois son attitude ne serait peut-être pas la même. Il avait fini par conclure qu’il fallait laisser une part de mystères dans la vie.

 

Ce soir-là, la famille se prépara à une bonne soirée. La mère s’occupa de la table et de la décoration. Elle avait trouvé dans un carton des guirlandes électriques composées de grosses ampoules diffusant une lumière blanche. Elle les attacha à des arbres en faisant passer au-dessus de la table de camping où ils allèrent manger. La lumière électrique combinée avec celle de la lune produisait un dôme qui repoussait les ténèbres, mais pas les moustiques. Cela formait une atmosphère de bal musette d’après-guerre. Pendant ce temps, le père et son fils préparaient le barbecue pour les grillades, composées de merguez, de côtes de porc épissé, et d’andouillettes. Le feu était alimenté par du bois. Aussitôt la nourriture posée sur la grille, une agréable odeur, propre à cette situation, enveloppa la famille. La fumée s’élevait à la verticale et formait un petit nuage au niveau du deuxième étage de la maison.

La table fut recouverte d’une nappe rouge qui mettait en valeur les assiettes en carton dorées et les verres ballons à reflets bleus. Quelques bougies rondes posées dans un récipient rempli d’eau voyageaient tels des radeaux sans but. Des pédales de fleurs roses comblaient le vide.

Ils dînèrent dans la bonne humeur. Tous riaient, racontaient des blagues et surtout mangeaient avec délice. Ce somptueux moment se termina par la grillade de chamallows.

 

               Le lendemain, le trio plia bagage et reprit la route, direction la demeure familiale. Durant le trajet, Dorian repensa à ses merveilleuses vacances avec nostalgie et un peu de perplexité. Dans trois jours, il pourra raconter tout cela à ses amis de classe.

Un amour sur un fond de liberté

Un amour sur un fond de liberté

Jérémie fermait sa dernière valise posée sur son lit. Dans trois heures, il prendra un avion pour se rendre en Turquie, puis en Syrie afin de réaliser un reportage sur les rebelles. En effet, notre héros travaillait comme journaliste dans un grand éditorial parisien. Il adorait s’imager au sein des conflits en but de récolter un maximum d’informations et ensuite d’écrire un dossier ou parfois un livre. Il avait couvert une dizaine de guerres au périple de sa vie. La peur de mourir ne l’empêchait pas d’exercer son métier, car il ne possédait aucune attache ni familiale ni sentimentale. Il n’éprouvait pas d’envies suicidaires, mais le jeune homme pensait que lorsque la solitude nous accompagne, on possède le droit de jouer avec la mort, si c’est pour une bonne raison. De plus, le fait d’éclairer les parts d’ombre des guerres actuelles était, selon lui, le meilleur moyen (à son échelle) d’aider les peuples opprimés.

Le journaliste pénétra dans sa salle de bain pour se raser. Il se regarda quelques secondes dans une glace située au-dessus du lavabo. Son visage était rond, tout comme ses lunettes qui lui donnaient un air de « premier de la classe ». Sa coupe de cheveux accentuait ce sentiment. Elle était composée principalement d’épis blond très foncé. Ils partaient dans tous les sens. Leur faible longueur ne rendait pas cette coiffure ridicule, elle donnait simplement un air nonchalant au personnage qui possédait une silhouette très fine. Seuls, ses yeux apportaient une touche de charme. Ils se coloriaient d’un bleu fort clair.

Il sortit de la salle de bain pour faire une dernière vérification avant de partir (durant ses absences, la voisine d’en dessous s’occupait de son appartement gracieusement).

La pièce principale trouvait sa lumière naturelle au travers d’un toit en verre de forme triangulaire. À ce moment de la journée, le soleil inondait l’endroit d’une déclinante lumière orangée. Tout semblait être au ralenti, comme le calme avant une tempête, ou plutôt avant l’apocalypse. La pièce regroupait le séjour, la salle à manger, la cuisine et la chambre à coucher en mezzanine . La nudité des murs laissait voir des briques blanches séparées par de larges joints gris clair. Cet élément décoratif se mariait très bien avec le thème de l’appartement qui se voulait être : « loft new -yokais ». Trois étagères en fin métal noir proposaient, à la vue de chacun, des dizaines de livres sur le thème de la science-fiction. Quelques tableaux d’art abstrait apportaient un peu de couleur à cet environnement. Un parquet clair couvrait le sol.

Jérémie prit sa grosse valise et ses billets d’avion sur le petit meuble d’entrée. Monta dans un taxi et partit direction l’aéroport « Charles De Gaules ». Il avait hâte d’être sur place pour commencer son travail.

 

Son avion atterrit en Turquie, puis il prit la direction de la frontière syrienne en jeep. L’aventurier emprunta uniquement des petites routes poussiéreuses afin de ne pas attirer l’attention. La nuit tombée, Jérémie pénétra en Syrie sous un ciel totalement étoilé. Tout de suite, il profita de l’obscurité pour poursuivre son chemin jusqu’à Homs. Sur la route, il voyait régulièrement l’ombre de bâtiments détruits, de carcasses de voiture, et d’un peu de végétations. Notre héros pensa que la nuit produisait le même effet d’une guerre : tout devint l’ombre de lui-même.

 

Au petit matin, il arriva sur les hauteurs de la ville de destination. Tous étaient que ruines. Les immeubles ressemblaient à des fantômes possédant des dizaines d’yeux et une bouche rectangulaire. En les voyant, on comprenait tout de suite que ce lieu avait subi la colère de la guerre. De plus, les routes ne pouvaient plus jouer leur rôle à cause des nombreux cratères formés certainement à la suite d’un bombardement. Sur le bas-côté, on pouvait apercevoir des restes de véhicule totalement brûlés. De temps à autre, ils fumaient encore, tout comme les ruines d’un imposant bâtiment situé au loin. Pour le moment, aucun signe de vie ne se montrait. Soit la totalité des êtres vivants s’était entre-tuée, soit la terreur dormait encore.

Jérémie descendit dans la ville, prudemment (toujours entouré d’un calme total). Il ne voyait toujours pas d’activité humaine. Il n’y avait même pas un chien ou un chat errant. Soudain, la vitre passagère arrière gauche explosa. Le conducteur pensa :

 

« Voilà une situation normale »

 

Il fonça avec la voiture vers un haut immeuble situé à sa gauche. La portière se frotta violemment contre un mur en béton troué par des balles, en produisant des étincelles. Une fois la voiture immobile, le conducteur sortit, tête baissée, par la portière passager. Il courut se réfugier dans l’entrée de l’immeuble, en fessant le tour de la voiture le plus vite possible. À l’intérieur, des morceaux de mur jonchaient le sol où des dizaines de petits carrelages n’étaient plus à leur place.

Un bruit de pas précipités se fit entendre dans la cage d’escalier. Jérémie eut un petit frisson dans le dos. Ses réflexes, acquis durant les différents conflits, lui ordonnèrent de se cacher derrière les escaliers. Un homme habillé en militaire apparut de dos. Il portait un fusil mitrailleur en bandoulière.

 

« Jérémie, mon ami, sort de ta cachette. Je suis ton contact, Saïd »

 

Le français sortit. Le militaire se tourna vers lui en souriant. Il portait une barbe naissante et de longs cheveux frisés descendant jusqu’aux épaules. Son nom était Saïd. Jérémie l’avait connu par internet, plus précisément sur un forum.

Après les salutations habituelles, Saïd proposa à son ami d’entrer directement dans le vif de l’action en allant voir comment il allait tuer le tireur d’élite de tout à l’heure. Ils montèrent sur le toit de l’immeuble où se trouvait un groupe de cinq rebelles. Tous faisaient très attention à ne pas faire dépasser leur tête au-dessus du muret qui encadrait le toit. Cette attention avait pour but de ne pas se prendre une balle en pleine tête. L’un d’entre eux tenait une petite requête. Après avoir salué Jérémie et clamé la grandeur de dieu à voix basse, l’homme, dont un foulard à carreaux rouges et blancs laissait uniquement voir des yeux pétillants de joie, plaça le projectile dans un mortier posé sur le sol et tourné vers un minaret qui était sûrement le refuge du sniper. À peine la requête enfoncée dans le tube, elle fut projetée vers le bâtiment, dans un fort sifflement. Quelques secondes après, une détonation retentit, accompagnée par des cris pour la louange d’Allah. Saïd se tourna vers son nouveau compagnon et dit :

 

« Bienvenue en enfer »

 

Les jours suivants étaient consacrés au filmage des atrocités faites par l’armée syrienne. Les avions bombardaient régulièrement des écoles pour tuer volontairement un maximum d’enfants. Le but étant de traumatiser la population et par conséquent la dominer de nouveau. De plus, Saïd expliqua devant la caméra que les soldats du gouvernement mettaient volontairement des cadavres de rebelle dans les rivières pour que la population les voie et pleure leurs morts.

 

Au troisième jour du tournage, les deux amis pénètrent en silence dans une cour intérieure fessant partie d’une grande demeure. Les rayons du soleil formaient un magnifique puits de lumière encadré d’ombre. La forte clarté mettait en valeur les minuscules carrelages posés au sol. Des plantes vertes avaient été mises à chaque coin de cette petite place. Lorsqu’on levait les yeux au ciel, on voyait une série d’étages formés par des « gardes fous » devançant des portes et des fenêtres, elles-mêmes protégées par une série de barreaux en métal noir. Au fond de cette tour de vide se trouvait un rectangle bleu uniforme avec, en son centre, un cercle jaune. Une intense chaleur régnait en ce lieu.

Les deux hommes, l’un armé de sa caméra et l’autre d’une kalachnikov, avancèrent prudemment vers une porte située devant eux, pour ressortir derrière la bâtisse. Saïd posa à peine sa main sur la poignée que cette dernière s’abaissa toute seule. Aussitôt, il pointa son arme vers la porte, tout en faisant signe à Jérémie de reculer. Derrière la porte, une voix féminine prononça fermement ces dires :

 

« Je suis une rebelle comme vous »

 

Il ouvrit la porte doucement, tout en continuant à la mettre en joue. Petit à petit, une jeune femme apparaissait à la vue des hommes. Elle portait l’uniforme militaire au complet. Lorsqu’on voyait les plis au niveau des manches de la veste, et du pantalon, on pouvait en déduire qu’elle avait sûrement volé ces habilles d’un soldat de grande taille. Étrangement, malgré sa tenue, une certaine féminité entourait cet être, surtout au niveau de ses mains qui tenaient pourtant un fusil. Ses cheveux se cachaient sous un Keffieh noir et belge. Le fait de ne pas voir sa chevelure mettait en valeur ses yeux bleu foncé. La jeune femme reprit rapidement la parole :

 

« Je m’appelle Chahla. Je suis seule, car tous mes compagnons d’armes sont tombés au combat, tout comme ma famille »

 

Elle prononçait ces mots en se forçant à ne pas montrer ses émotions.

 

« Bienvenue dans notre groupe de combat, Chahla » dit fièrement Saïd.

 

Les jours passés et les combats s’intensifiaient. Le trio menait des actions de sabotage pour mettre en déroute l’armée. Une fois, ils pénétrèrent, durant une nuit, dans un service d’épuration d’eau qui desservait uniquement l’armée. Ils placèrent des explosifs, puis s’éloignèrent du bâtiment. Quelques secondes plus tard, une énorme boule de feu s’éleva parmi la pénombre.

Au même moment de ces actions, Jérémie et Chahla faisaient plus amble connaissance, surtout durant les soirées à la belle étoile, sur le toit d’un immeuble. Ils se retrouvaient toujours seuls au tour d’un feu, car Saïd profitait du calme pour rendre visite à sa famille. Le couple discutait souvent de sujets sociétaires, comme la religion. La jeune femme était favorable à un état laïc. Elle détestait les extrémistes religieux qui voulaient absolument appliquer la charia. Cela signifierait que la totalité des femmes du pays serait réduite en état de « meuble ». Elles n’auraient plus aucun droit et elles seraient obligées de se promener sous une sorte de drap tel un fantôme. La jeune femme voulait, pour son pays, une démocratie laïque comme en Europe.

 

Les jours passés et ce duo se rapprochait de plus en plus. Il appréciait les moments passés à deux. Leur amitié était passée à un stade supérieur, mais ils l’ignoraient encore.

 

Le 25 septembre, Jérémie était sur le point de reprendre la route, direction la Turquie pour prendre un avion afin d’entrer chez lui. Cependant, une petite voix disait de rester, car une nouvelle vie l’attendait. Il vie dans les yeux de Chahla des larmes. Cela le surpris énormément, il l’a connaisse bien à présent. Même le récit de la mort de sa mère ne lui tirait aucune larme. L’homme comprit la situation. Il descendit de son véhicule, puis courus vers la femme pour l’embrasser.

Le soir, après une longue discussion avec sa petite amie et Saïd, notre homme décida de rester en Syrie, non plus pour filmer, mais pour se battre auprès du peuple.

 

Chaque nuit suivante, le couple descendait dans une cave spécialement aménagée pour eux. On y trouvait, au centre, un lit entouré de bougies posées à même le sol. Elles formaient une bulle de lumière dans laquelle les amoureux s’y réfugiaient pour faire l’amour. Durant ces moments, ils avaient la sensation d’être isolés de l’horreur de la guerre. Les hurlements de cette dernière leur paressaient très lointain. Plus rien ne comptait pour eux. Leurs sentiments l’un vers l’autre se matérialisaient au travers de caresses et de baisers.

 

Après un an de conflit, les rebelles prirent le pouvoir et formèrent une démocratie laïque. Le jeune couple se maria en prenant Saïd comme témoin, et eut deux filles.

 

La jeune fille venue des camps d’extermination

La jeune fille venue des camps d’extermination

Des roulottes en bois coloré par des tons très vifs longeaient, sur un chantier poussiéreux et jonché de cailloux souvent expulsés par les grandes roues qui fessaient voltigé la poussière, un lac étincelant au soleil de midi. Cet astre enveloppait ce lieu d’une intense chaleur. L’eau se froissait avec des petites vagues mourant sur des pierres où des têtards réalisaient leurs premiers battements queue, mais au pare avant elles naissaient d’une légère brise d’été qui fessait peu mouvoir les feuilles des arbres bordant le chemin et arborant tout un large éventail de vert très gai. À leur pied, des touffes d’herbes servaient comme abri aux criquets. Ils rendaient le calme totalement inexistant. L’étendue liquide s’entourait, à environ cinquante mètres du rivage couvert de gros cailloux brûlants, de collines peu hautes entièrement submergées par une unique forêt. Parfois, elle se retirait pour cause d’un ancien éboulis.

Parmi ces gitans se trouvait une jeune fille assise sur l’avant d’une roulotte possédant un toit vert et tirée par un cheval de trait, plus précisément un Ardennais. On pouvait estimer son âge à une vingtaine d’années vu son visage juvénile qui reflétait le calme, mais s’endurcissait avec des traits légèrement masculins. Sa tête, un peu trop allongée, s’entourait d’une chevelure frisée couleur noir corbeau descendant jusqu’au milieu du dos telle une cascade agitée. Elle possédait des yeux marron lançant un regard confiant et animé d’une grande joie de vivre, comme si elle avait vécu l’enfer.

En effet, Sarah, la jeune femme, venait de vivre trois ans dans camps d’extermination au fin fond de l’Allemagne. Durant la première année, ses parents vécurent en sa compagnie avec une cinquantaine d’autres détenus sous le même toit, dans des conditions de vie totalement insalubre. L’exemple le plus significatif étant certainement les cinq seaux servant de toilette.

Pendant une journée hivernale, sa mère et son père furent amenés au four crématoire, car les soldats nazis avaient eût l’ordre de libérer des places pour les nouveaux arrivants. Sarah dormait encore quand cela arriva. À son réveille, elle comprit immédiatement la situation et transforma aussitôt sa tristesse en carapace en but de se protéger de son environnement, si bien que, le jour où les nazis vinrent la chercher pour lui faire pendre sa dernière douche, elle proposât ses services charnels. Évidemment, les hommes acceptèrent, car cela faisait trois mois qu’aucun rapport sexuel avec une femme ne leur fut proposé (dans les moments pareils, les hommes oublient facilement leurs idéaux). Grâce à ce fait, la fille évita durant deux ans la mort en se prostituant, non pas par raison pécuniaire, mais simplement pour prolonger sa vie de quelques semaines. Parfois, elle devait subir des viols collectifs plusieurs fois en une seule journée, entre les murs des bureaux des officiers. Durant les jours extrêmes, les responsables du camp fessaient intervenir des chiens ou des objets insolites. Chaque fois, Sarah partait dans des mondes imaginaires pour diminuer sa douleur physique, mais surtout mentale. Le plus souvent, son univers se voulait être une forêt tropicale parmi lesquelles elle se promenait en compagnie divers animaux. La jeune femme discutait logement avec eux au sujet de la sauvagerie des êtres humains.

Par ses pratiques, l’adolescente attira rapidement la colère des autres détenus qui essayaient de faire de même avec leur corps, même les individus masculins. Leurs efforts restaient vains, seule Sarah détenait, grâce à sa beauté naturelle, ce rôle lui offrant nombreux privilèges, comme le fait de pouvoir prendre plus de douches ou d’avoir un peu plus de nourriture.

En 1945, l’armée américaine libéra le camp. La jeune femme libre décida de sillonner la France en compagnie d’un groupe de gitans.

 

Elle admirait le lac entre les troncs d’arbres, en profitant au maximum de l’instant présent, au travers de petits moments plaisants, à l’identique de la population française qui sortait tout juste de six horribles années rythmées au vacarme des bombardements, à la vue des cadavres déchiquetés par les mitrailleuses, aux arrestations sommaires et à la famine. Concernant ce sujet, de son côté, après sa libération, notre héroïne prit vingt kilos en redécouvrant le plaisir gastronomique. Sa silhouette trahissait se fait. Cependant, le détail le plus révélateur était certainement son corset rouge en dentelle qui possédait un décolleté très bien rempli, même trop vu que la partie haute des seins passait au-dessus de la limite du vêtement. Ses jambes se dissimulaient sous une longue robe noire décorée par une grosse rose rouge située au centre.

 

Le petit groupe arriva sur la place principale d’un petit village pittoresque typique au sud de la France. Par chance, aucun dommage durant la guerre ne l’avait défiguré. L’endroit où ils se trouvaient s’encadrer de platanes offrant une ombre fraiche aux éventuels joueurs de pétanque appartenant tous au troisième âge. Une petite église blanche se dressait à l’extrémité. Tout était si calme, seuls les oiseaux osaient perturber la période de la sieste respectée par tous les vieux du village. Ce moment de la journée mettait le temps à l’arrêt : les ruelles étaient vidées de leurs activités, les magasins baissaient rideau, les terrasses des cafés offraient des terrains de jeux à des chats libres accompagnés par une légère brise. Et, si par hasard ou plutôt par chance, on rencontrait un individu au détour d’une étroite rue, l’impression que nous aurons ce serait de voir une femme ou un homme totalement apathique pour cause de forte chaleur.

Aussitôt, les chevaux à l’arrêt, la moitié des personnes de sexe masculin monta la scène pour les futures représentations et l’autre moitié s’occupa des animaux. Pendant ce temps, les femmes préparaient le repas dans une roulotte prévue à cet effet. Une heure après, tout le monde se rassembla au centre de la place, en formant un large cercle composé uniquement par des musiciens hommes. Les dames s’exerçaient, au centre, à leur danse traditionnelle pour les différents spectacles à venir. Sarah dansait à part du groupe, dans une sorte de transe lui faisant fermer les yeux et sourire à peu bêtement comme si elle était simple d’esprit naturellement ou artificiellement. Ses mouvements gracieux trouvaient existence dans la lenteur même.

Non loin de là, un jeune homme habillait d’une chemise à carreaux rouge et d’un jeans délavé revenait de la pêche. Il portait une casquette grise et blanche à six côtés, avec une courte visière. Elle était en équilibre sur une touffe de cheveux bruns mal peignée. Son visage juvénile portait une fine barbe parsemée sur les joues gonflées par un surplus de nourriture, et autour d’une bouche un peu plus grosse de la moyenne. Pierre n’avait que seize ans, mais sa taille lui en donnait au moins vingt. Cette particularité était propre à sa famille qui était les seuls fermiers de la région. Les habitants du coin n’hésitaient pas à faire plusieurs kilomètres pour acheter diverses denrées alimentaires totalement naturelles, évidemment. Le père, un homme possédant une musculature digne d’un bœuf, travaillait chaque jour été comme hiver aux champs, pendant que sa mère, une petite grosse femme aux cheveux courts et frisés portant uniquement de longues robes à pièce unique très large et recouverte d’un tablier blanc immaculé de taches de sangs d’animaux, s’occupait avec son fils des bêtes.

Pierre, le jeune homme, était timide. À l’école, la solitude l’accompagnait toujours, non pas par obligation, mais par volonté. Il s’amusait avec la nature en l’observant, en l’apprenant et en la protégeant. Quelques filles l’avaient déjà fait chavirer son cœur. Chaque fois, il n’avait pas osé aller les voir pour faire leur connaissance. Cependant, depuis à certains temps, il se sentait attirer de plus en plus par eux, surtout par l’envie de les toucher, de les caresser et de les embrasser.

En montant la pente menant à la place, Pierre vit Sarah en train de danser. Tout de suite, une chose non habituelle se passa en lui. Il la trouva très belle dans sa longue robe blanche qui mettait en valeur son teint brun, tout en cachant ses formes. Il resta dix minutes à l’observer d’un air rêveur. Puis, reparti en direction de la demeure familiale.

 

Le jeune homme arriva devant une ferme organisée au tour d’une cour intérieure devancée par une arche taillée dans un mur en pierre rouge. Une terre sèche et complètement craquelée pour cause de grande sécheresse couvrait le sol, tout comme les nombreuses fientes provenant des poules et des coques qui se promenaient selon leur grès.

Le jeune homme quitta l’odeur des animaux pour la senteur d’un ragoût de carotte préparé par sa mère en hâte, entre deux nettoyages d’étable. La cuisine était décorée par des photos en noir et blanc d’un jeune homme à peine plus vieux que Pierre.

« J’espère que tu as pris plein de poisson »

« Oui maman, vingt-cinq belles truites »

« Magnifique mon fils, j’irai en vendre demain aux bohémiens. Au fait, à propos d’eux, ce soir, lorsque ton père revendra des champs, on ira voir leur représentation pour nous détendre un peu »

La joie ressentît par Pierre figea un bête sourire sur ses lèvres. La femme surprise, car cela fessait des années qu’elle n’avait pas vu son fils heureux, s’exclama :

« Mon fils, ça va ? Tu as l’air tout con, d’un coup »

« Suis juste content pour ce soir »

Le garçon passa son après-midi à s’occuper des vaches comme d’habitude. Cependant, cette fois, l’attention ne paraissait pas être au rendez-vous à cause d’une inconnue danseuse monopolisant son esprit échauffé d’adolescent désireux de coucher avec une fille.

 

Le soir venu, la famille se rendit sur la place du village décorée pour l’occasion avec des guirlandes électriques à grosses ampoules blanches reliant les arbres de chaque côté du lieu, créant ainsi un plafond lumineux sous lequel été disposé devant une scène des bancs en bois pour les spectateurs déjà nombreux. Il régnait une atmosphère festive au travers d’une agréable odeur mêlant la pomme d’amour, la barbe à papa et les diverses friandises. Même les criquets s’invitaient au rendez-vous par leur chant caractéristique du sud de la France.

Pierre posa à peine ses fesses sur le banc du dernier rang qu’une petite explosion retentit au centre de la scène, produisant une opaque fumée blanche servant à faire office de rideau éphémère pour l’apparition d’un homme moustachu au charisme artificiel et sur joué. Il incarnait le rôle de présentateur pour les différents numéros de la soirée réalisés par les saltimbanques composés d’acrobates, de jongleurs, de cracheurs de feu, et de clown. Puis, vient le tour des danseuses accompagnées par leurs musiciens installés à gauche de la scène pour laisser toute la place aux femmes. Évidemment, Sarah était présente. Elle tourbillonnait, sautillait et valsait avec légèreté et grâce.

Pierre n’avait d’yeux que pour elle. Il admirait sa féminité, tout en imaginant être à ses côtés. À la suite du spectacle, l’adolescent décida de prendre son courage à deux mains et d’aller rencontrer la jeune bohémienne pour faire sa connaissance. Il se présenta face à sa roulotte, gravit les trois marches, puis frappa à la porte. En redescendant le petit escalier, la porte s’ouvrit et en relevant la tête, il la vit se tenir sur le seuil de la porte. Derrière elle, on apercevait des bougies posées sur une commode. Sarah pris la parole :

« Bonjour jeune homme, c’est pourquoi ? »

« Je vous ai vu danser et je vous ai trouvé très belle donc je souhaite faire votre connaissance »

« Merci pour ce compliment, mais ne me vouvoie pas, car cela me vieillit. Rendre donc, on va boire un verre »

Sarah parlait d’une voix grave, non pas comme un homme, car il avait toujours une grande féminité parmi sa voie, mais plutôt comme une chanteuse de jazz. Cette particularité lui donnait un côté suave.

Les deux jeunes personnes rentrèrent dans la roulotte fortement décorée avec des dessins de grosses fleurs multicolores. Ils s’assirent sur une banquette encadrant une table où était posée une bouteille de vin rosé à moitié vide. D’abord, la discussion eut pour sujet les présentations simples, puis vient le tour de leur passé pour tant court, mais si chargé, on pouvait dire qu’ils ont vécu une vie entière en quelques années seulement. Ce moment plaisant se termina vers une heure après minuit par la promesse faite par Sarah de revoir Pierre, le lendemain.

 

La semaine commença par un premier baiser sur la bouche au cours d’une promenade autour du lac. C’était le premier la première fois pour Pierre, cela lui fit sentir homme.

Les jours suivants se résumaient pour la femme comme suit : balades main dans la main, répétitions et représentations. Le vendredi matin, Sarah donna rendez-vous à son petit ami au bord du lac sur le ponton à vingt-trois heures.

 

Pierre arriva à l’heure dite devant le ponton où Sarah l’attendait habillée uniquement d’une longue robe blanche et d’une paire de grosses chaussures noir montant jusqu’au milieu de ses mollets. Malgré la nuit, qui apportait quelque chose un peu féérique au travers des centaines de lucioles illuminant le lac et des grenouilles répondant aux criquets dans une symphonie improvisée, le jeune homme aperçût que sa copine ne portait rien en dessous de sa fine robe. Il avança vers elle tout en se concentrant, pour se calmer, sur la nature endormie non pas seulement par l’heure tardive, mais également par la chaleur qui était encore étouffante malgré l’absence du soleil. Sarah comprit, aux premiers mots de Pierre, que ce dernier subissait un grand stress sûrement à cause ce qu’il allait se passer. Elle lui proposa d’enlever ses chaussures afin de tremper leurs pieds tout en discutant de choses et d’autres. Après dix minutes de dialogue ennuyeux, notre héroïne se leva, et d’un geste d’une fluidité presque surnaturel enleva sa robe. Ensuite aida Pierre, qui semblait être complètement stupéfait par la rapidité de la scène, à se mettre debout à son tour. Le garçon ne servait pas quoi faire face à tant d’inconnu. Une ferme poitrine généreuse lui donnait envie de les prendre en plaine et de retrouver des sensations connues lorsqu’il avait cinq ans. Sarah comprit son envie grâce à son regard soutenu. Elle avança, pris les mains masculines, puis les plaça délicatement sur ses seins en disant :

« N’ai pas peur, fait ce que tu as envie »

À ces mots, Pierre prit les deux seins en même temps, et les palpa comme quand il le fessait avec un fruit pour voir sa maturité. La fille se mordit distraitement sa lèvre, empêchant ainsi un léger rire moqueur de sortir et, par la même occasion, de frustrer le jeune homme effectuant de son mieux malgré le fait qui se sentait gêné, car une forte pression déformait son pantalon au niveau de sa braguette. Cette pression, il la connaissait bien. Chaque fois qu’il rêvait d’une femme en maillot de bain, elle venait le perturber dans son sommeil, puis lui donnait un bien-être sans semblable, et finalement lui mouillait son pantalon de pyjama. À cette pensée, Pierre s’empressa de dire avec une certaine gêne dans la voie :

« Quand mon pénis est tout dur, comme en ce moment, je finis toujours par pisser et je ne veux pas le faire sur toi »

« Gros bêta ! Ce n’est pas de la pisse, c’est du sperme »

« C’est pour faire les bébés ? »

« Exactement »

« Mais, on va être parents ? »

« Non, ne t’en fais pas, je prends des potions pour ne pas être enceinte »

Sarah retira la chemise avec grande difficulté pour cause de raideur. Elle cola sa poitrine sur son torse nu, tout en l’embrassa langoureusement sur la bouche et dans le cou. Le garçon était gêné avec ses mains, il ne servait pas où les mettre, une fois sur le dos, une fois sur fesses rebondies, mais pas trop longtemps de crainte de mouiller son pantalon.

Sarah abaissa en même temps le jeans et le slip. Aussitôt, un pénis tendu au maximum vint rebondir sur le bas ventre du garçon, en produisant un très léger bruit, à peine audible. La jeune dame pensa, dans un premier temps, à pratiquer une fellation, mais elle se ravisa en réfléchissant que pour son compagnon c’était sûrement sa première relation sexuelle, et donc, elle allait avoir une mauvaise surprise. La gitane demanda à l’adolescent de s’allonger sur la couverture qu’elle venait d’installer au bout du ponton.

Une heure plus tard, le nouveau Pierre était étendu dans son lit rêvant déjà d’un magnifique mariage.

 

Le lendemain matin, vers huit heures, Pierre se rendit, comme chaque jour de la semaine, sur la place du village pour rendre visite à sa bienaimée. Cependant, cette fois, une mauvaise surprise l’attendait. En effet, les gitans étaient en train de démonter la scène et d’attacher les chevaux aux roulottes. Le jeune garçon avança d’un pas assuré vers Sarah qui rangeait ses vêtements dans grosse male en cuir marron. À sa vue, elle se sentit gêné et décida de prendre les devants :

« Bonjour Pierre, vient dans ma roulotte, on doit parler »

« Oui, je te comprends, ce n’est pas facile pour toi de quitter tes amis. Cependant, j’ai une surprise, tu peux venir vivre chez mes parents, ils sont d’accord »

Sarah sourit timidement.

« C’est très gentil. Cependant, je n’ai aucune envie de quitter mon groupe, c’est ma famille »

« Pas problème, je viens avec toi. Laisse-moi juste le temps de pendre mes affaires »

« Tu es mignon ! Pierre, tu es un garçon adorable et je suis sûr qu’un jour, tu trouveras une fille digne de ton amour, car pour moi, tu étais seulement une aventure amoureuse d’une semaine, comme les autres hommes que j’ai rencontrés dans d’autres villages, à la différence près, tu es nettement plus respectueux que les autres. Quand je reviendrai ici, viens me voir, on passera encore de bons moments ensemble »

« Je croyais qu’on allait se marier »

Sarah émit un léger rire.

« Cette réaction est normale, car je suis ton premier grand amour. Ne t’inquiète pas, un jour, tu trouveras ta femme. À présent, il faudrait mieux que tu partes, car les séparations les plus courtes sont les moins douloureuses »

Sans même laisser Pierre répondre à cette douloureuse phrase, Sahara partit s’enfermer dans sa roulotte, évitant ainsi une longue confrontation avec son ex temporaire petit ami. Ce dernier resta seul au milieu de la place, complètement abasourdi par la rapidité de la scène qui venait se passer et où il était un simple spectateur. Tout se mélangeait dans son esprit : plus d’avenir, plus de mariage, retour à sa solitude et… il courut en larmes vers sa maison, complètement perdu. Son sang cognait sur ses tempes, ce qui lui donnait un mal de crâne épouvantable accentué par la luminosité du soleil qui fessait briller ses larmes sur ses joues rougies par l’effort physique. Il ne réfléchissait même plus, il voyait juste ses rêves brisés. Un rêve certes absurde pour n’importe quelle personne hors de cette scène, mais tellement réel pour Pierre qui n’avait jamais connu l’amour auparavant et qu’aucune fille ne s’était intéressée à lui. En seulement une semaine, une femme lui avait fait découvrir le monde du « couple » avec toutes ses sensations, aussi bien sensuelles que sexuelles.

Il arriva à la ferme où sa mère ramassait les fientes de poules pour ensuite s’en servir comme fumier. Le garçon se dirigea vers une grange servant à entreposer le foin. Monta à l’étage le plus rapidement possible, car sa génitrice le suivait pour avoir plus d’informations, même si elle pensait savoir l’origine de la tristesse de leur fils. Dès que Pierre arriva sur le plancher, il ferma à clef la porte derrière lui, puis poussa contre cette dernière un énorme sac de grain.   À peine cinq secondes plus tard, sa mère tambourinait en criant :

« Ouvre-nous, ne fais pas de bêtise pour une fille qui ne mérite pas ton amour »

Être deux sanglots, Pierre leur répondit :

« Comment tu le sais que c’est à cause de Sarah ? »

« Moi et ton père, on a été jeune avant toi, on a eu également des déceptions amoureuses donc on sait que c’est très douloureux, mais on arrive toujours à surmonter ce mauvais moment avec le temps, fait nous confiance. À présent, ouvre-moi la porte s’il te plaît »

La femme eut comme réponse une série de sanglots.

L’homme effondré avança sur des planches craquantes vers le côté sans mur de la pièce qui servait à faire monter les ballots de paille à l’aide d’une poulie et d’une corde. Cette ouverture donnait sur des champs de lavande entre coupés par des pelouses brûlées par le soleil. Il plaça ses pieds au bord du vide et regarda le sol qui se trouvait à vingt mettre en dessous de lui. Les pleures redoublèrent à quel point cela ressemblait à de la folie qui déformait son visage en lui fessant faire des grimaces ridicules. Folie, oui, car il ne pensait plus, il voyait uniquement sa rupture, sa fin de sa courte de vie de couple, et une seule question accaparait son esprit : pourquoi continuer de vivre sans elle ?

Pierre mit son poids vers l’avant, en disant à voix basse cette phrase :

« Sarah, je t’attends là-haut »

Son visage heurta violemment, en produisait un bruit semblable à l’éclatement à une grosse pastèque, la dalle de béton qui se trouvait en dessous et qui fessait face à une pelouse. Elle se fit éclabousser par des jets de sang ce qui eut pour effet de créer des gouttelettes rouges aux côtés des perles de rosée. Cet ensemble de perles brillait au soleil. Pierre formait une croix parfaite, car les jambes étaient droites et serrées l’une contre l’autre, et les bras s’écartaient du corps. Une mare de sang s’était formée autour de sa tête tournée face contre terre, donnant l’impression d’être enfoncé dans le béton. La mère accourut à ses côtés, puis s’agenouillât auprès du corps inerte en pleurant.

 

À moitié dissimulée derrière le mur d’entrée de la cour, Sarah regardait avec des yeux remplis de joie la scène pour temps terriblement tragique. Elle prenait un grand plaisir à voir Pierre mort, ou tout au moins en train de mourir, comme face à un très beau paysage. Elle devait effectuer un effort permanent pour ne pas s’approcher de la scène pour voir plus de détails et ainsi augmenter son plaisir tellement malsain pour une personne hors de son passé. En effet, les viols subits l’avaient fait haïr tous les hommes et par conséquent à se venger. Cependant, comme elle était maligne, elle n’avait pas opté pour le meurtre avec application directe, mais pour une assistassions au suicide indirect. Pour se faire, chaque fois qu’elle arrivait dans un nouveau village en compagnie de sa troupe, elle repérait rapidement un adolescent isolé et fragile psychologiquement, puis le draguait et se mettait en couple avec pour enfin se séparer de lui et le faire souffrir jusqu’au suicide. Généralement, le final était plus long à venir (elle devait revenir quelques jours après sa rupture pour contempler son travail), mais elle savait très bien qu’avec Pierre, cela allait être nettement plus rapide qu’en temps normal, car l’adolescent était encore fortement attristé par la mort de son grand frère durant la guerre.

Sarah partit tout sourire avant l’arrivée du médecin, laissant derrière elle, une onzième famille dans un deuil matinal.

 

Par la suite, Sarah continua sa tournée meurtrière jusqu’à sa vingtième victime, dans un village du nord de la France où elle trouva une compagne de son âge nommée Émilie et qui avait également subi des viols durant la guerre. Peu de temps après, elles décidèrent d’enlever un garçonnet de quelques mois pour l’élever loin de la civilisation dans les Pyrénées. Leur éducation se concentra uniquement sur le respect des femmes. Comme cela, elles espéraient créer une génération d’hommes parfaits, ou plutôt des « hommes-femmes ».